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Kappalys, maître-d’oeuvre de la cloudification

Pionnier de la business intelligence en France, Kappalys étend son expertise à l’intégration du cloud pour ses clients professionnels. Sa stratégie combine la personnalisation des projets et l’automatisation optimale.

Juin 2021
Texte Vincent Verhaeghe, photos Éric Bénard, andia.fr

Intarissable lorsqu’il s’agit de parler de son métier ou de technologie, Cyril Carratt, P.-D.G. de Kappalys a du mal à répondre à une seule question : comment définir son entreprise en une phrase ? « C’est effectivement très compliqué, même lorsque l’on est devant un client ! Le terme d’entreprise de services numériques est trop générique. On peut nous qualifier de fournisseur de services managés mais ça serait, pour le coup, réducteur par rapport à notre champ de compétences. Nous suivons une approche très verticale de notre activité, mais cette verticalité englobe elle-même beaucoup de sujets. » Kappalys, dont le siège est établi à Mont-Saint-Aignan, à quelques minutes du centre de Rouen, est effectivement un acteur assez atypique du channel. Son domaine d’expertise couvre le cloud, mais le spectre de ses activités de bout en bout combine la cloudification de vieilles applications tournant sur des mainframes et hébergement, en passant par toutes les strates as a Service. Le tout, assorti d’un niveau de technicité et d’une capacité d’adaptation rarement constatés dans une PME de vingt personnes. Comment est-ce possible ? Réponse : en zoomant sur le parcours de Cyril Carratt. Titulaire d’un DESS (Master 2 aujourd’hui) en génie informatique et génie logiciel décroché à l’université de Rouen-Normandie, il baigne depuis toujours dans la technologie. Il lance, en 1994, ce qui façonnera plus tard le socle de Kappalys sous l’appellation de Tutorial Informatique. « À l’époque, il s’agit d’une structure unipersonnelle au sein de laquelle je propose surtout de la formation technique en entreprise », explique-t-il. Trois ans après ce lancement, son frère Jérôme le rejoint et apporte son expertise dans des domaines comme l’AS400 ou le mainframe. D’autres compétences se développent notamment autour des réseaux avec Cisco, et un premier virage est alors pris quand les deux frères rencontrent Oracle. L’éditeur américain recherche des partenaires en régions pour soutenir son serveur d’applications OAS, et trouve son bonheur en Normandie chez Cyril et Jérôme Carratt.

« Services numériques ou managés ? L’approche très verticale de notre activité englobe beaucoup de sujets »

Cyril Carratt, P.-D.G. de Kappalys

ORIENTÉS BUSINESS INTELLIGENCE AVANT LA LETTRE

Voilà qui fonctionne si bien qu’en 2000, ils décident de transformer leur structure de simples consultants, en SARL dotée de huit collaborateurs. Ils commencent alors à s’intéresser à la data – loin d’être considérée comme une ressource première – tout en étendant leur spectre de services vers la micro et les serveurs. En 2005, Oracle les incite une fois encore à changer de cap. La firme de Larry Ellison vient de racheter la plate-forme de CRM Siebel, mais manque cruellement de partenaires pour développer cette nouvelle activité en France qui met en jeu les fondements de la business intelligence. Même si les frères Carratt ne commercialisent pas ce type de technologie au sein de Tutorial Informatique, ils en connaissent les tenants et les aboutissants. « En marge de notre entreprise, mon frère et moi sommes, à l’époque, professeurs associés à l’université de Rouen-Normandie sur des sujets comme la B.I., qu’on appelait d’ailleurs data mining et aujourd’hui analytics. » Les deux frères saisissent l’opportunité de se spécialiser dans la business intelligence, rarissime en France au milieu des années 2000. La raison sociale devient Occam, du nom du philosophe Guillaume d’Ockham. « Il a établi un principe qui nous identifiait très bien : la loi de la parcimonie stipule qu’il n’est pas nécessaire de multiplier les actions pour obtenir un bon résultat. De cela, est dérivé le rasoir d’Ockham qu’on résume ainsi : l’explication la plus simple est souvent la meilleure », précise Cyril Carratt. Encore embryonnaire, le secteur de la B.I. permet à Occam de se faire connaître et de développer des projets novateurs. Voilà un domaine où il faut être inventif et parfaitement comprendre les besoins de clients. La plus grande difficulté étant bien souvent de montrer en quoi l’analyse et l’exploitation des données sera à même de fournir une nouvelle vision stratégique. « Au début, nous nous situons dans une B.I. d’exploitation, principalement : grâce à nos outils, nous analysons les données comptables, et identifions les éléments organisationnels changeables ou optimisables. Mais l’augmentation de la puissance de calcul aidant, nous entrons dans l’ère bien plus passionnante de la B.I. opérationnelle avec, cette fois, des résultats qui orientent les clients vers une mutation de leur business model », explique Cyril Carratt. C’est le cas de l’enseigne Micromania qui, face aux changements des habitudes de consommation des joueurs, et en s’appuyant sur le travail analytique de Kappalys/Occam, transforme ses points de vente en y proposant notamment tous les produits dérivés des jeux vidéo. « Et la prochaine étape de la B.I. sera l’analyse prédictive qui permettra d’anticiper les changements. Mais il faut pour cela maîtriser non seulement les outils, mais aussi les données. » Chaque projet est spécifique, et convaincre les clients de leur intérêt est souvent complexe car il est, par définition, impossible de démontrer des résultats a priori. « Nous faisons face, notamment, à des processus de décision très longs chez les clients, et parfois à des DSI qui voient d’un mauvais oeil les recommandations engendrées par nos analyses de données. D’ailleurs, dans huit cas sur dix, nous parlons plutôt aux directions métier qu’aux DSI. Et aucun projet de B.I. ne pourra être entériné s’il n’est pas soutenu par la direction, car nous touchons au coeur même de l’entreprise », note-t-il.

« Le contractuel est devenu stratégique : en un an, notre revenu récurrent mensuel a été multiplié par deux »

Josué Césaire, directeur commercial, Kappalys

LE SERVICE À TAILLE HUMAINE

Pendant une dizaine d’années, le prestataire peaufine son offre B.I. avant d’opérer un autre changement en 2015. La business intelligence reste un des piliers de l’offre, mais les dirigeants souhaitent capitaliser davantage sur les compétences. « Nous savions comment faire de la data, du réseau, du développement… alors pourquoi ne pas suivre une approche à la fois verticale et de bout en bout sur des services cloud ? » Une décision qui se combine avec une raison sociale inédite : Kappalys – « le nom ne veut rien dire, mon frère y tenait ! » s’amuse Cyril Carratt. Une organisation qui coïncide avec l’arrivée de Josué Césaire en tant que directeur commercial, et qui incite aussi Kappalys à investir dans l’infrastructure. L’enseigne ne souhaite pas disposer de son propre data center, mais c’est tout comme : elle installe ses propres serveurs, baies et appliances dans les locaux appartenant à Equinix. Et d’autres sur des serveurs régionaux pour une offre liée à l’edge computing. « Nous profitons ainsi des performances et de la résilience des installations d’Equinix, tout en restant souverains de nos équipements. Nous accédons donc, pour le compte de nos clients, à des connexions à 100 Gbps voire 400 Gbps, et en six ans, nous n’avons constaté aucune coupure. » Ainsi armé, Kappalys entre dans une phase où l’objectif est de pousser quasiment n’importe quel service cloud à tous ses clients. « Nous proposons les mêmes services qu’AWS ou Azure, mais à un prix défiant toute concurrence », résume simplement Cyril Carratt. Une posture qui peut paraître surestimée pour une entreprise qui réalisait 1,2 M€ de C.A. en 2020, mais la réalité est là : l’offre de Kappalys n’a effectivement pas grand-chose à envier aux géants du cloud, que ce soit pour le SaaS, l’IaaS et la PaaS. En outre, la dimension humaine permet de répondre parfois à des situations spéciales. Exemple : transférer en SaaS, le vieil ERP d’un client qui n’était pas cloud natif. « Cette offre de services nous a fait entrer dans une logique beaucoup plus MSP dans laquelle le contractuel est devenu stratégique. En un an, notre revenu récurrent mensuel a doublé », explique Josué Césaire, pour atteindre le seuil des 50 % en MRR ou monthly recurring revenue, c’est-à-dire se rapprocher du taux idéal du modèle MSP. Mieux, en moins de six mois cette année, le groupe a déjà atteint son C.A. de 2020. « C’est très confortable quand on arrive à un tel niveau car nous démarrons l’année de façon beaucoup plus sereins, et cela nous permet de réinvestir dans l’entreprise. » Et pas avec parcimonie : quand on sait que certains serveurs Oracle exploités par le revendeur valent un demi-million d’euros… Kappalys est guidée par une stratégie ambivalente qui vise à proposer des services à la carte à ses clients, y compris dans des domaines précis comme le DevOps et le DevSecOps, tout en répondant à l’automatisation et à l’industrialisation propres aux MSP. Mais cela fonctionne grâce à des dirigeants et à une équipe qui acquièrent en permanence des compétences sur les technologies de pointe. « Nous nous intéressons notamment aux infrastructures de cloud dites Liquid obéissant à une approche différente de l’attribution des ressources, et qui représente le vrai cloud. Nous nous positionnons aussi sur les fermes de serveurs ARM plus écoresponsables que les data centers, car nous y sommes sensibles », conclut Cyril Carratt.

« Nous proposons les mêmes services qu’AWS ou Azure, mais à un prix défiant toute concurrence »

Cyril Carratt, P.-D.G. de Kappalys

ZOOM SUR KAPPALYS
1994 Création de l’entreprise sous le nom de Tutorial Informatique
2005 La raison sociale devient Occam
2015 Troisième changement : l’entreprise s’appellera Kappalys
C.A. 2020 : 1,2 M €
Effectif : 20 personnes
Cible : PME, ETI et grands comptes
Marques principales : Oracle, Dell, Veeam, Stormshield