« Le marché de l’impression B to B reste extrêmement important »
Le marché de l’impression B to B a décliné. Philippe Pelletier estime cependant que celui-ci offre toujours des perspectives réjouissantes aux constructeurs qui s’adaptent à la réduction des coûts réclamée par les clients.
Sep 2023Philippe Pelletier, directeur marketing et des opérations commerciales Canon France - Propos recueillis par Thierry Bienfait
Comment se porte le marché de l’impression ? La révolution du « zéro papier » s’est-elle diffusée partout ?
Malgré la dynamique des processus de dématérialisation, nous sommes encore très loin d’avoir atteint le « zéro papier ». Dans le B to B, sur le segment du corporate, le marché est toutefois en perte de vitesse. Même s’il reste extrêmement important, on y observe une baisse des ventes. Le volume d’impressions marque le pas dans les organisations.
La crise de la Covid a sensiblement accéléré l’adoption de nouvelles pratiques en la matière, qui commençaient à se répandre depuis une quinzaine d’années avec la mise en place de solutions MPS. Résultat, les utilisateurs se sont habitués à moins imprimer dans les entreprises.
En revanche, en ce qui concerne le marché de la « production », celui des imprimeurs et reprographes, on assiste au contraire à une forte croissance, due à un transfert des technologies analogiques des presses offset traditionnelles vers le numérique.
Les constructeurs conjuguent à tout-va les mots « services » et « cloud ». Les machines sont-elles toujours le sujet central ?
Sur ce marché de commodité, l’intelligence logicielle destinée à la gestion de la politique d’impression a migré de la machine vers le cloud. C’est le changement le plus significatif. Une évolution liée à l’adoption des formules d’impression avec forfait par de plus en plus d’organisations, en raison notamment de l’attrait du confort d’utilisation, d’une consommation plus prédictible et d’une maintenance facilitée.
Avec des gammes de solutions permettant de limiter le nombre d’impressions, les constructeurs ne se cannibalisent-ils pas ?
Si, c’est un fait. Les partenaires revendeurs nous en avaient d’ailleurs déjà fait la remarque quand les solutions MPS ont fait leur apparition, à la fin des années 2000 : « Vous êtes en train de scier
la branche sur laquelle vous étiez confortablement installés. »
Même si cela s’est traduit par une chute des ventes en volume, les constructeurs n’ont fait que suivre la tendance du marché. C’est un principe incontournable : l’offre doit correspondre à la demande. Chez les grands comptes et même dans les PME, le client veut réduire le nombre d’impressions. Pour survivre et se développer, le fabricant n’a d’autre choix que de proposer des solutions répondant à ces attentes.
Un modèle économique centré sur l’innovation autour des technologies d’impression est-il toujours pertinent ?
En termes de performance et de qualité, nous sommes arrivés à une apogée technologique. Aujourd’hui, nous investissons davantage dans l’intelligence et les applications que dans la mécanique. Cela dit, les gros investissements que Canon consacre encore à la R&D autour du moteur d’impression nous permettent de proposer des produits extrêmement fiables.
Après cinq ans d’utilisation, nos machines récupérées en fin de contrat ne sont même pas arrivées à 50 % de leur durée de vie maximale. De tels matériels peuvent sans problème servir à alimenter le marché de la seconde main, qui attire de plus en plus de clients.
Les constructeurs misent-ils plus qu’avant sur leurs activités de production ou de logistique pour réduire les coûts ?
Comme la production se fait essentiellement en Asie, nous sommes tributaires du fret. Donc, nous avons réduit de 10 % à 15 % le poids de nos modèles, ce qui a eu un impact bénéfique sur les frais de transport. Avant cela, Canon s’était donné une feuille de route pour jouer la carte de l’écoconception. Par exemple, une technologie évitant le préchauffage du four a pour effet de réduire l’empreinte carbone.
Le démantèlement de nos machines est pensé dès la conception afin de les recycler et mieux valoriser les matières. Côté emballages, nous faisons évoluer les formes et recourons à de nouveaux substrats. Toutes ces techniques maintiennent les coûts au plus bas.
Bio express
De formation supérieure école de commerce, Philippe Pelletier possède une longue expérience marketing dans les secteurs de l’IT et des arts et industries graphiques.
Arrivé chez Canon en 1998 comme chef de produits, il est aujourd’hui directeur marketing et des opérations commerciales chez Canon France pour les activités B to B concernant les marchés de l’impression en entreprise, de l’impression de production industrielle et de la gestion de l’information.