Pictogramme documents électroniques

Le tremplin de la dématérialisation

Accessible à distance, collaborative, dopée à l’intelligence artificielle, la gestion électronique des documents de nouvelle génération s’adapte à de multiples scénarios et à chaque type d’entreprise.

Oct 2021
Par Frédéric Bergonzoli

Son acronyme a beau dater de quelques décennies, la gestion électronique des documents est loin d’être dépassée. Sans elle, pas d’échanges ni de collaboratif et, donc, des activités réduites dans l’économie digitale. Qu’elle serve à structurer des documents à partir d’un simple thésaurus et de métadonnées sommaires, ou qu’elle soit exploitée dans des projets ambitieux où priment l’orchestration de données capturées, l’analyse de contenu, la signature et la conservation des documents, la GED est un socle de la transformation numérique. Elle n’est surtout plus l’application isolée qu’on trouvait dans la plupart des entreprises, voilà encore cinq ans. Par opposition à des solutions en silos, elle est qualifiée de transverse, capable de dialoguer avec des logiciels métier, et de gérer le cycle de vie du document à travers ses multiples phases : acquisition, production, gestion des versions, circulation, validation, signature et archivage. Les spécialistes parlent de documents d’activité ou de records et d’archives courantes, intermédiaires ou définitives. Autant de notions qui soulignent la nécessité d’ordonner l’information, d’optimiser l’accès aux données, et de gérer le risque en étant en mesure de préserver et de produire des preuves en cas de litige. Grande bavarde, la GED consigne toute activité dans ses outils de journalisation en enregistrant l’ensemble des actions réalisées sur un document pour savoir qui a fait quoi et à quel moment, voire pour identifier des usages illicites… La traçabilité est un de ses points forts – un atout valable autant pour la sécurité que pour le RGPD – la flexibilité en est un autre : « Nous modelons notre produit service par service, et quasiment utilisateur par utilisateur, de façon à ce que chacun n’accède qu’à ce qui lui est permis. Cela se matérialise, par exemple, par le paramétrage de l’interface avec des outils que l’on fait apparaître ou que l’on masque. Nous ne demandons pas à l’utilisateur de s’adapter à notre produit, c’est nous qui l’adaptons à son travail », indique Thierry Imbert, directeur Qualité chez Sages.

Portrait de Thierry Imbert - Sages

« Nous modelons notre produit par services, et quasiment utilisateur par utilisateur »

Thierry Imbert, directeur Qualité, Sages

DE L’ARCHIVAGE PAPIER À LA PLATE-FORME INTERACTIVE

Quant aux sociétés dont la GED ne répond pas aux exigences des enjeux du collaboratif et de sécurité contemporains, elles n’ont pas d’autre choix que d’en changer. « Un projet de migration commence par l’exportation de l’ensemble des données de l’ancien système avant de les importer dans le nouveau. Il est indispensable d’éviter les interruptions d’activité pendant la migration, pour les utilisateurs comme pour les clients et les partenaires. L’opération se divise en quatre étapes qui, si elles sont effectuées correctement et hiérarchiquement, assurent une transition sans accroc. En premier lieu, il s’agit de transférer les métadonnées des documents afin de clôturer les anciens systèmes, pour éliminer les coûts de maintenance et de fonctionnement. La phase de transition permet ensuite d’utiliser ces métadonnées sur la nouvelle plate-forme pour accéder simultanément
aux anciens et aux nouveaux documents, grâce à des banques de données. La phase de migration qui suit consiste à stocker les nouveaux documents sur la plate-forme, avec des utilisateurs qui dès lors, utilisent la nouvelle solution pour leurs tâches quotidiennes. Enfin, les documents de l’ancien système sont progressivement transférés en arrièreplan sans perturber l’activité », explique Xavier Doulaud, Country Manager chez SER Group. Vouée à l’origine au classement, à la recherche et à la conservation de documents papier numérisés, la GED s’est transformée en plate-forme interactive dotée de composants fonctionnels qui automatisent des processus métier associés aux RH, à la comptabilité ou encore au commerce, en toute sécurité et dans le respect des règlements européens.

Portrait Philippe Clair - Keyrus Digital

« La GED doit être conçue et intégrée dans une logique d’usage de bout en bout de la chaîne de valeur du document »

Philippe Clair, directeur de Keyrus Digital

AUTOMATISÉ PAR INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Sans oublier l’IA pour identifier, classer et générer les métadonnées. La GED n’est plus un outil numérique de plus mais bien une pièce maîtresse. « Sa mise en place est un projet d’entreprise à plusieurs niveaux, qui doit prendre en compte les besoins immédiats, mais aussi anticiper les futurs besoins de l’entreprise en matière de mutation digitale. Mettre en place un projet de dématérialisation des factures c’est bien, mais penser à la poursuite de sa transformation numérique avec un horizon de deux ans à trois ans, c’est encore mieux ! La GED doit être vue non pas comme un outil, mais comme un moyen d’atteindre les objectifs liés à la stratégie de l’entreprise, capable d’activer certains leviers plus globaux, selon des objectifs fixés par les directions engagées. Une GED est aussi un projet d’entreprise du point de vue de l’humain. En impliquant des utilisateurs et des directions métier dans le choix de l’outil final, ces derniers se sentiront bien plus concernées par le projet, et la conduite du changement en sortira grandement facilitée », indique Jean-Louis Sadokh, directeur général de T2i.

Dossiers sur une carte imprimée

Toute l’ambition de tels projets est de redistribuer l’information partout dans l’entreprise. Mais rien n’est moins simple, on est souvent dans le sur-mesure, constatent les spécialistes, car l’information et la manière de l’exploiter sont conditionnées par des facteurs endogènes (usages, processus métier, stratégie et gouvernance) et exogènes (technologies et réglementation) à l’environnement de l’entreprise, et dont les intérêts et la vitesse de mutation divergent fortement. Autre grand pilier fonctionnel, le collaboratif a été renforcé par l’organisation du télétravail, allant même jusqu’à l’ajout de modules de visioconférence et de chat dans certaines offres. « Le télétravail a mené les entreprises vers des solutions de GED où n’existent ni contraintes techniques ni limitations d’usage afin que chaque collaborateur dispose des mêmes conditions de travail au bureau ou à distance », indique Mickael Sastrel, directeur d’Eukles. Dans ces nouvelles approches organisationnelles où la technologie ne rencontre pas d’écueils, la valeur que peut en tirer l’entreprise est significative. « Longtemps, la GED a été vue comme un enjeu de stockage et de sécurisation des données. De nos jours, – depuis dix-huit mois surtout – ce qui fait la valeur des contenus, c’est l’usage et l’interaction qu’on en tire. Le dispositif de gestion documentaire doit se concevoir et s’intégrer dans une logique d’usage de bout en bout de la chaîne de valeur du document, de sa création, à son interaction, jusqu’à son stockage à caractère probant. On ne gèrera plus, d’un côté, le stock, en abordant, de l’autre, le collaboratif et l’échange autour des documents », prévient Jean-Philippe Clair, directeur de Keyrus Digital.

Portrait Xavier Doulaud -SER Group

« Aucun arrêt de l’activité pendant la migration, pour les utilisateurs comme pour les clients et les partenaires »

Xavier Doulaud, Country Manager, SER Group

AVIS D’EXPERT
LES MÉTADONNÉES, CES DONNÉES QUI CONTEXTUALISENT LES DOCUMENTS

Les métadonnées désignent des données décrivant d’autres données, des traces numériques qui accompagnent le document pendant tout son cycle de vie. Elles sont indispensables pour identifier et indexer du contenu. Charlotte Maday, consultante chez Spark Archives, fait un point sur leurs enjeux. « Les métadonnées sont des informations structurées qui décrivent des actifs informationnels, qu’ils soient au format physique ou au format électronique. Les métadonnées contextualisent les documents, elles répondent à des questions essentielles : Qui a écrit ce ou ces documents ? Pourquoi ? Dans quelles conditions ? Quand ? Où ? On distingue quatre grands ensembles de métadonnées, ensuite regroupées en trois catégories correspondant à des moments du cycle de vie du document (voir le schéma ci-dessous).

Schéma sur les métadonnées

Les frontières sont souvent floues entre ces ensembles de métadonnées. Parfois, les métadonnées descriptives sont utilisables pour des règles de gestion telles que la date de création qui peut servir de point de départ pour le calcul de la durée de conservation. D’autre part, toute information de contexte du document est potentiellement une métadonnée : le volume peut vite devenir exponentiel et très complexe à gérer. Les métadonnées doivent en effet être maintenues dans les mêmes conditions que le document qu’elles qualifient. Cela engendre alors des coûts significatifs en termes de production, de conservation et de destruction, et même de communication et de diffusion, compte tenu de ses enjeux d’interopérabilité. Devant cette complexité pour les utilisateurs finaux, les recommandations d’automatiser le plus possible la capture ou la saisie des métadonnées prennent du sens. »