Cloud

Place aux consoles unifiées pour faciliter l’orchestration

Pour optimiser l’administration des ressources dans l’entreprise, quels que soient les environnements, les grands éditeurs commercialisent des consoles unifiées et des solutions de gestion sur site.

Fév 2024
Par Benoît Huet

Les grands fournisseurs de cloud, comme AWS, Azure, Google Cloud, OVHcloud et d’autres encore, ont créé des interfaces très intuitives pour aider les administrateurs à provisionner et à gérer leurs ressources cloud.

Rien de plus simple donc, pour une entreprise qui souhaite se lancer dans le cloud public. Cette facilité entraîne même un phénomène addictif, en plus d’une vraie dépendance. Là où cela se complique, c’est lorsque les entreprises évoluent dans des environnements multicloud. La gestion des ressources devient alors un casse-tête. « Nous constatons effectivement chez certains de nos clients qui consomment de multiples clouds que leur organisation est très “silotée”. Vous avez ainsi différentes équipes, et les coûts peuvent rapidement déraper », prévient Mos Amokhtari, responsable des architectes chez Red Hat France.

Un avis que confirme Stéphane Berthaud, directeur technique France et Afrique Nord-Ouest de Nutanix : « Entre l’équipe qui gère Microsoft 365, celle qui administre les services AWS et celle dédiée aux environnements on-premises, il est compliqué de transférer les actifs et les workloads, chacun restant dans son silo. »

Pour Xavier Perret, directeur Azure chez Microsoft France, tous ces grands comptes réclament logiquement une unification de l’ensemble des ressources. Aux environnements hybrides et multiclouds, l’orchestration doit désormais ajouter les environnements cloud de type edge. Bref, prendre en compte les données au plus près des besoins. C’est typiquement le cas d’une entreprise qui dispose d’agences souhaitant bénéficier de plus d’autonomie dans la gestion de leurs ressources.

« Depuis Nutanix Central, l’utilisateur peut provisionner des services de fichiers, du stockage objet S3, des services de conteneurisation chez un hyperscaler, chez OVHcloud ou en local »

Stéphane Berthaud, directeur technique France et Afrique Nord-Ouest de Nutanix
Stephane Berthaud - Nutanix

Une console unique…

Multicloud, hybride, edge : quelle que soit l’approche ou les approches, il faut simplifier l’orchestration de tous ces environnements en donnant aux administrateurs le moyen de consommer leurs ressources depuis une console unique. Or, des plates-formes de gestion unifiée des ressources, il en existe déjà sur le marché.

Microsoft apporte cette simplicité avec son offre Arc, lancée il y a trois ans. « Azure Arc est en quelque sorte une extension d’Azure Resource Manager [le service de déploiement et de gestion d’Azure, NDLR] », rappelle Xavier Perret. Azure Arc joue en effet le rôle d’une passerelle, via des agents et des API, entre Azure, les autres clouds publics, l’edge et les environnements hybrides. Par exemple, depuis Azure Arc, il est possible de définir une politique de sécurité sur l’ensemble des ressources, de gérer une ressource SQL, d’administrer un cluster Kubernetes, et même de manager des ressources VMware vSphere. Le service VMware vSphere avec Azure Arc, annoncé lors du dernier événement Ignite en novembre 2023, permet l’utilisation cohérente des fonctionnalités de sécurité, de gouvernance et de gestion d’Azure dans VMware vSphere et Azure. Par exemple, depuis Azure Arc, il est possible de créer
des machines virtuelles VMware, de les redimensionner et même de les supprimer.

Mos Amokhtari - Red Hat

« En parallèle d’Ansible, Red Hat recommande de commencer avec une infrastructure standard, comme OpenShift »

Mos Amokhtari, responsable des architectes chez Red Hat France

Pour VMware – en pleine restructuration depuis le rachat par Broadcom –, l’éditeur met toujours en avant VMware Aria Suite et vCloud Suite, qui fournissent cette couche de consommation en libre-service. De son côté, Nutanix répond à cette problématique d’orchestration avec Nutanix Prism Central et, depuis quelques mois, avec Nutanix Central. Cette dernière est une surcouche supplémentaire accessible en mode SaaS pour simplifier la gestion multicloud et hybride des entreprises qui ont, selon Stéphane Berthaud, déployé plusieurs consoles Prism Central sur différentes plaques géographiques. « Avec Nutanix Central, l’utilisateur peut provisionner des services de fichiers, du stockage objet S3, des services de conteneurisation chez un hyperscaler, chez OVHcloud ou en local. C’est une alternative à AWS et Azure. Elle fait abstraction de ces consoles sous-jacentes. »

Pour le porte-parole de Nutanix, l’usage d’une console unifiée supprime énormément d’opérations rébarbatives pour les administrateurs, ces derniers pouvant donc se concentrer sur d’autres tâches à plus forte valeur ajoutée, comme la formation à d’autres services cloud, autour de l’intelligence artificielle par exemple.

Chez HPE, l’orchestration s’appuie sur GreenLake Cloud Platform. Ouverte via des API, cette plate-forme possède un developer portal pour aider à son intégration, ainsi qu’une place de marché avec de nombreuses alliances et des ISV. « Nous fournissons également des solutions complètes, comme HPE GreenLake for Private Cloud Enterprise, cloud privé automatisé et managé permettant de gérer à la fois du bare metal, de la VM et du container. Il peut s’appuyer sur des instances cloud de référence optimisées pour tout type de workload. Cette solution se présente avec un control plane complet qui apporte une gestion unifiée, que ce soit dans un centre de données ou dans l’edge. Mais aussi une intégration avec les grands acteurs du cloud public. Cela pour bénéficier d’un modèle hybride avec interopérabilité EK-S d’AWS, AzureStack HCI/Arc et d’autres encore », poursuit Charles Henry, leader de la division Transformation, Solutions and Cloud Services chez HPE France.

« Azure Arc fait office de passerelle entre Azure, les clouds publics, l’edge et les environnements hybrides »

Xavier Perret, directeur Azure chez Microsoft France
Xavier Perret - Microsoft

… pour masquer la complexité

Chez Red Hat, deux types de solutions sont envisageables. La première, comme le mentionne Mos Amokhtari, consiste à déployer la solution d’automatisation Ansible Automation Platform pour orchestrer un maximum de ressources en masquant la complexité. « Avec Ansible, nous proposons un ensemble de playbooks préformatés », précise-t-il. Et pour simplifier la création de nouveaux playbooks, l’éditeur a récemment lancé Ansible Lightspeed avec IBM WatsonX Code Assistant.

En effet, ce dernier exploite une IA générative verticalisée autour de l’apprentissage des playbooks en question. À noter que cette solution peut être hébergée dans le propre centre de données du client : par cette offre packagée, Red Hat répond notamment aux besoins du secteur de la finance. En parallèle de cette automatisation, Red Hat soutient une autre approche pour répondre à l’hétérogénéité des environnements. Celle-ci consiste à commencer avec une infrastructure le plus standard possible, que l’on peut déployer en interne et que l’on retrouve chez les grands cloud providers, comme AWS et Google Cloud, ainsi que dans les environnements de type edge. Derrière cette approche se cachent l’architecture OpenShift et la solution Advanced Cluster Management. Cette dernière va permettre, via une console, de créer des clusters dans le data center, dans le cloud et dans l’edge.

Laurent Vanel - IBM

« IBM Hybrid Cloud Mesh, service de réseau virtualisé, permet par exemple de simplifier le déplacement d’un workload chez un hyperscaler vers un autre hyperscaler ou en interne »

Laurent Vanel, directeur technique des comptes stratégiques chez IBM France

IBM, maison mère de Red Hat, supporte logiquement OpenShift, la conteneurisation et son approche open source dans cet effort de standardisation pour simplifier le système d’information. De surcroît, IBM sait répondre au problème d’orchestration des environnements hybrides, edge et multicloud en prenant en compte la portabilité des environnements (des mainframes aux accélérateurs d’inférences IA), comme le mentionne Laurent Vanel, directeur technique des comptes stratégiques chez IBM France. Par le biais de son offre Cloud Satellite, qui s’appuie sous OpenShift, IBM déploie ses services d’infrastructures chez les hyperscalers ou les centres de données choisis par les clients.

IBM met en avant ses deux bras armés de l’orchestration, dont Red Hat Ansible et Terraform, qui décrit l’infrastructure cloud finale souhaitée (ou l’infrastructure sur site pour exécuter une application). Avec Terraform, on entre clairement dans « l’infrastructure as code ». « Cette année, nous avons également lancé IBM Hybrid Cloud Mesh, un service de réseau virtualisé qui permet de simplifier le déplacement d’un workload chez un hyperscaler soit vers un autre hyperscaler, soit en interne », ajoute Laurent Vanel. Enfin, le porte-parole d’IBM évoque déjà le futur de l’orchestration avec la « composabilité » : il s’agit de mettre à disposition des composants et des services dans un catalogue universel.

Le multicloud, encore peu répandu dans les entreprises

Datacenter

À en croire certains interlocuteurs, le multicloud n’est pas si répandu dans les entreprises françaises, hormis quelques grands comptes. « Les entreprises réfléchissent surtout à ce qu’elles veulent mettre dans le cloud public », reconnaît Mos Amokhtari, responsable des architectes chez Red Hat France. Les organisations, de par leur patrimoine applicatif historique, évoluent surtout dans un environnement hybride mélangeant au moins deux clouds différents. Par exemple, un cloud privé, où leurs applications sont hébergées dans leur propre centre de données, un cloud dédié à une application SaaS et un cloud public pour aller chercher de nouveaux services.

« Très peu d’entreprises adoptent encore un mode cloud public only ou des programmes de lift & shift massifs. Il y a plutôt une volonté de ramener et de gérer les IaaS et CaaS en mode on-premises, avec un meilleur contrôle des coûts et des données », affirme de son côté Charles Henry. Aujourd’hui, 70 % des clients souhaitent utiliser un modèle opérationnel hybride, 70 % de workloads tournent encore en on-premises, et 50 % des informations numériques sont créées et traitées en dehors des data centers.

Des partenaires à l’appui des éditeurs et autour de l’orchestration

Les éditeurs qui commercialisent ces plates-formes d’orchestration s’appuient sur des partenaires intégrateurs. C’est par exemple le cas de HPE. « De nombreux services providers en France choisissent nos solutions et modèles as a service HPE GreenLake au cœur de leur dispositif de production, dont des grands noms français en cours d’agrément SecNumCloud », précise Charles Henry.

C’est aussi le cas de Red Hat qui, par son programme Partner Connect, apporte son expertise dans le design et l’intégration grâce à des formations certifiantes. Microsoft, de son côté, encourage ses partenaires, avec son programme global, à proposer des centres d’opérations multicloud et hybrides par la maîtrise de l’offre Azure Arc. Certains ajoutent à leur savoir-faire Azure Stack HCI depuis Azure Arc, dont l’objectif est de gérer les conteneurs et charges de travail virtualisés, et à gagner en efficacité lorsque les données doivent rester en local pour des raisons légales ou de confidentialité. La valeur ajoutée des partenaires provient également du déploiement des agents et du développement, via des API, pour assurer l’interopérabilité des interfaces vers cette console unifiée de gestion des ressources. De plus, l’aspect financier prend toute son importance pour calculer le coût total d’acquisition et le retour sur investissement d’une telle solution d’orchestration.

« Chez Nutanix, nous mettons à la disposition de nos partenaires et clients des cloud economists, ces experts capables de faire des simulations et d’en visualiser les gains. C’est un service très apprécié », précise Stéphane Berthaud. De fait, cette vision délibérément FinOps, tous les acteurs la revendiquent aujourd’hui.