Naaia

Naaia, solution de conformité pour l’AI Act

Depuis 2021, la start-up Naaia développe une plate-forme qui permet, entre autres, de vérifier la conformité d’un système d’intelligence artificielle par rapport à l’AI Act. Une solution qui tombe à pic alors que les entreprises s’interrogent sur le sujet.

Avr 2024
Par Vincent Verhaeghe

Création

Précurseurs et pas suiveurs ; voilà comment on peut qualifier les quatre cofondateurs de Naaia. Ils ont en effet créé la start-up en 2021, avant la déferlante ChatGPT et tout le buzz autour de l’IA générative que l’on connaît aujourd’hui.

« Nous accompagnons les entreprises depuis plus de vingt ans sur leur transformation digitale et leur mise en conformité réglementaire. Lorsque la Commission européenne s’est emparée du sujet de l’IA et de sa réglementation en avril 2021 avec le projet d’AI Act, nous avons pressenti le choc réglementaire et son triple impact technologique, juridique et organisationnel que cela constituerait pour les organisations ainsi que l’expansion du besoin de conformité au niveau mondial. En lançant ce projet, l’Europe annonçait qu’elle avait l’intention de devenir la première place mondiale de réglementation de l’IA », explique Nathalie Beslay, présidente de Naaia.

Avocate spécialisée dans le secteur de la santé, elle a cofondé l’entreprise avec deux autres avocats, Olivia Rime (également spécialisée dans la santé) et Benjamin May (spécialisé dans la finance), et un consultant, Côme Sauzay, qui en est le directeur général. S’écartant du modèle traditionnel de la start-up, Naaia développe sa solution sur les fonds propres de ses fondateurs, sans s’appuyer sur un business angel.

Même s’il évoque les naïades de la mythologie grecque, le nom « Naaia » a surtout été choisi pour faire apparaître les acronymes AI et IA afin d’induire le positionnement international de l’entreprise sur l’intelligence artificielle.

Développement

À court terme, le premier objectif de Naaia est de continuer à développer sa plate-forme en lui ajoutant de nouveaux LLM. Des portails permettront également aux fournisseurs et aux éditeurs de réaliser des audits automatisés pour savoir s’ils sont concernés par l’IA, et la start-up envisage de proposer un portail comparable à destination du grand public.

Parmi les projets à plus long terme, Naaia prévoit d’adapter sa plate-forme à d’autres réglementations que l’AI Act pour en faire une plate-forme de qualification réglementaire bien plus globale. On peut tout à fait y intégrer le règlement général sur la protection des données (RGPD), par exemple. Monté sur les fonds propres des fondateurs, Naaia vient de réaliser sa première levée de fonds à hauteur de 1,4 million d’euros et a signé un accord avec Bpifrance.

« Nous sommes le premier éditeur européen à fournir une solution de gestion des risques et de mise en conformité »

Côme Sauzay, directeur général de Naaia
Come Sauzay - Naaia

Produit

La plate-forme conçue et commercialisée par Naaia est une AIMS. « Nous sommes le premier éditeur européen à fournir une solution de gestion des risques et de mise en conformité. Nous l’appelons AIMS pour Artificial Intelligence Management System, terme que nous avons déposé », explique Côme Sauzay.

La plate-forme repose sur quatre blocs. Le premier permet d’analyser n’importe quel système d’intelligence artificielle (SIA) pour étudier sa conformité avec les textes réglementaires de l’AI Act et le qualifier. Dans un deuxième temps, l’AIMS propose des actions pour conformer le SIA afin de transformer les obligations réglementaires en actions. Le troisième bloc concerne le suivi du SIA tout au long de sa durée de vie. « Notre plate-forme a été pensée pour s’interfacer en API avec des applications existantes chez nos clients, par exemple Slack, Teams, GitHub, GitLab, Hugging Face », explique Nathalie Beslay. Enfin, le quatrième bloc concerne la formation des collaborateurs de l’entreprise pour faciliter la prise en main des outils.

« Nous intégrons et fusionnons dans notre plate-forme différents référentiels : le référentiel des réglementations européennes et mondiales, le référentiel sectoriel et les référentiels internes de nos clients et leurs bonnes pratiques. »

Clientèle et distribution

Pour la jeune pousse, la cible de clientèle est vite identifiée : les grands comptes du CAC 40 et du SBF 120. Ce sont ces grands groupes principalement qui sont concernés par les problématiques liées à l’IA. Mais le potentiel est bien plus vaste car l’IA peut intéresser et impacter toutes les entreprises.

La plate-forme AIMS ne se limite pas au client final. Toute la chaîne de valeur est concernée par la conformité, qu’on soit concepteur, fournisseur, distributeur ou utilisateur des solutions. Il y a en effet une chaîne de responsabilité dans le déploiement d’un SIA dont l’utilisateur final n’est qu’un maillon.

La start-up s’intéresse également à des petites entreprises qui ont basé toute leur stratégie sur l’IA, notamment des éditeurs, qui eux aussi ont l’obligation de conformer leurs solutions à la législation. Bénéficiant de leur expérience d’avocats d’affaires et de consultant, les fondateurs de Naaia ont eu quelques facilités pour présenter leur solution à des grands groupes, et deux du CAC 40 font déjà partie de leurs clients.

Mais pour accroître son activité, les dirigeants n’hésitent pas à passer par des intermédiaires. Sans parler encore de véritable « channel », la distribution fait partie des plans. « Pour l’heure, nos partenaires sont des grands cabinets de consulting qui font face aux demandes de leurs clients vis-à-vis des problématiques de conformité, ainsi que des cabinets spécialisés dans la data. »

Business model

L’AIMS de Naaia est commercialisé sous forme de licence avec souscription dont le montant varie en fonction du nombre de SIA gérés pour le client (de 1 à 5 SIA pour le premier niveau de souscription, sachant qu’il n’est pas rare qu’une grande entreprise dispose de plusieurs centaines de SIA), mais aussi selon la zone géographique concernée. C’est là un autre point fort de la plate-forme, qui est multirégionale. « Notre plate-forme traite l’ensemble des réglementations mondiales existantes ou à venir concernant l’intelligence artificielle.

Outre l’AI Act européen, nous avons déjà intégré les réglementations américaine (Executive Order on the Safe, Secure, and Trustworthy Development and Use of Artificial Intelligence) et chinoise (Interim Measures for the Management of Generative Artificial Intelligence Services), et nous ajouterons les autres zones quand elles auront publié leurs propres textes. » Des modules optionnels existent pour certains référentiels sectoriels ou métier. La solution est uniquement disponible en SaaS et les licences ne sont pas limitées en matière de nombre d’utilisateurs.

Fiche d’identité

Année de création : 2021
Chiffre d’affaires : non communiqué
Nombre d’employés : 15
Siège social : Paris

AI Act

L’AI Act, proposé en 2021 par Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, commence
à faire des remous à la suite de son adoption, le 2 février, par les États membres de l’Union européenne à l’unanimité, après plusieurs mois de débats. Le texte, qui devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2026, met deux stratégies en porte-à-faux : celle des États très avancés en matière d’IA et disposant notamment d’un tissu entrepreneurial fort dans ce domaine, et les autres, qui voient surtout dans l’IA un outil dont il faut user avec précaution et avec des garde-fous, par exemple en ce qui concerne la protection des données ou la gestion des droits d’auteur.

La France se situe à mi-chemin entre ces deux « philosophies » car, à l’image de Naaia, elle possède dans l’escarcelle de la French Tech de nombreuses start-up sur ce marché. Certains analystes estiment que l’AI Act sera un casse-tête pour les entreprises car elles vont être confrontées à des coûts exorbitants pour conformer leurs SIA. En outre, des pénalités en cas de non-respect des règles seront calculées en fonction du chiffre d’affaires, à l’instar du RGPD. Autant d’éléments qui vont dans le sens de ce que propose Naaia dont les fondateurs font preuve d’une belle anticipation !

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