VMware pare sa stratégie multicloud d’une bonne dose d’IA
Pas de grandes annonces à VMware Explore ! La Chine faisait en effet attendre sa décision sur le rachat par Broadcom, enfin approuvé depuis. Sans surprise, l’IA fut l’invitée de marque de l’événement, avec quelques nouveautés qui renforcent la stratégie multicloud de l’éditeur.
Jan 2024Par Vincent Verhaeghe, à Barcelone
À l’instar du « .com » des années 1990 ou du cloud des années 2000, l’intelligence artificielle est devenue l’invitée incontournable de toute manifestation liée de près ou de loin à l’IT.
Et il n’a pas fallu attendre longtemps à VMware Explore puisque l’IA fut le premier « mot » de la première conférence ! Dans le cas de VMware, ce n’est toutefois pas une simple posture d’effet de mode. L’éditeur est, de par son positionnement, impliqué dans l’intelligence artificielle aussi bien pour ses propres besoins que pour ceux de ses partenaires et de ses clients.
Avant même la déferlante ChatGPT du début d’année, VMware a mis en place depuis plus d’un an des ressources dédiées à cette technologie au sein d’un AI Labs. « Nous étions davantage dans la logique de l’IA prédictive, basée sur l’analytique et le big data. Désormais, nous travaillons également sur l’IA générative et tous les débouchés qu’elle offre pour nos clients et nos partenaires. Un des objectifs est de fournir à notre écosystème des modèles basés sur notre propre expérience. Cela part d’un constat simple : puisque nous faisons face aux mêmes cas d’usage que nos clients vis-à-vis de l’IA, pourquoi ne pas les partager avec eux ? », explique Chris Wolf, vice-président VMware AI Labs. C’est d’autant plus stratégique que, selon les chiffres publiés par l’institut McKinsey, l’intelligence artificielle représente un marché de 4 400 milliards de dollars.
« Le coût est devenu le critère prioritaire pour le choix d’une infrastructure. Nous sommes idéalement positionnés »
Marc Dollois, directeur général France de VMware
Broadcom discret mais présent
Loin de ces considérations sur l’IA, une des questions latentes à VMware Explore concernait la présence et l’implication de Broadcom. L’annonce du rachat de VMware auprès de Dell Technologies par le géant américain du semi-conducteur avait eu lieu quelques semaines avant l’édition 2022 de VMware Explore.
Depuis, plusieurs enquêtes des autorités antitrust s’en sont suivies. Au moment de VMware Explore, du 6 au 9 novembre, ne restait que la Chine à approuver, ou pas, cette fusion, les États-Unis, l’Europe et la Grande-Bretagne l’ayant déjà validée. C’est enfin chose faite ; l’Administration d’État chinoise pour la régulation des marchés (SAMR) a donné son feu vert le 21 novembre. Mais, lors de l’événement à Barcelone, le CEO de VMware, Raghu Raghuram, a expliqué qu’il n’était pas en mesure d’évoquer ce rachat.
Les participants ont cependant pu être témoins de l’implication de Broadcom avec l’intervention de Hock Tan, président de Broadcom, qui a communiqué en quelques mots les grandes lignes de sa stratégie pour VMware : intensifier la R&D, investir auprès de l’écosystème de partenaires et optimiser l’offre de l’éditeur autour du cloud pour qu’elle soit plus simple à promouvoir et à commercialiser. Car il ne faut pas perdre de vue que, malgré le futur prometteur de l’IA, le premier métier de VMware est le cloud, et la marque se présente comme le chantre du Cloud Smart, la gestion efficace d’architectures mixant cloud hybride et multicloud. « L’an passé, nos études montraient que chaque entreprise disposait en moyenne de 2,3 clouds différents. Cette année, le chiffre est monté à 3,5, et il est impossible de savoir jusqu’où il va grimper.
Une diversité qui s’explique notamment par les stratégies plus verticales des clients, qui choisissent parfois un fournisseur de cloud pour un service précis, parfois pour des raisons géographiques en optant pour un data center régional », explique Marc Dollois, directeur général France de VMware. Pour l’éditeur, c’est du pain bénit puisque son offre à travers la VMware Cloud Foundation est pensée pour répondre à ces infrastructures polyvalentes et protéiformes.
La marque annonce ainsi une croissance de 31 % dans ce secteur au cours de l’année écoulée, un taux qui dénote positivement dans une ambiance inflationniste où les clients ont plutôt tendance à resserrer les budgets. « Le coût est devenu le critère prioritaire pour le choix d’une infrastructure. Nous sommes idéalement positionnés puisque, quand un client investit un euro dans des solutions VMware, il en gagne deux », souligne Marc Dollois. L’éditeur fait également le constat que le cloud hybride, qui était une organisation trouvant son équilibre entre privé et public, s’oriente désormais vers un modèle tripartite avec la croissance soutenue du Edge.
Dans le retail, l’industrie ou les telcos notamment, le Edge devient un maillon essentiel de la chaîne, et certaines annonces de VMware vont dans ce sens. Par exemple, Private AI, annoncée lors de VMware Explore, a pour objectif de proposer les solutions liées à l’intelligence artificielle dans le cadre d’une architecture composite. « Un des facteurs de crainte vis-à-vis de l’IA est la perte de contrôle des données que les entreprises utiliseront pour leurs services d’IA générative. Avec Private IT, nous leur donnons la possibilité de les exploiter aussi bien dans une infrastructure privée que dans le cloud ou l’Edge, de façon
à en garder le contrôle », explique Chris Wolf.
La stratégie IA présentée par Chris Wolf, vice-président VMware AI Labs, se calque sur l’offre cloud de l’éditeur.
Des partenariats à foison
Private AI est aussi l’occasion pour VMware de renforcer certains partenariats puisque l’architecture sera soutenue notamment par Google avec sa base de données autogérée AlloyDB Omni. Toujours dans un esprit de préserver les données privées, Google a même annoncé que ce service serait disponible on-premises, confirmant la vision de VMware sur l’abolition des frontières entre le cloud privé et le cloud public.
Les traitements propres à l’intelligence artificielle nécessite bien sûr des développements applicatifs importants, mais il faut également une puissance de calcul repoussant de nouvelles limites pour les réaliser efficacement. Là aussi, VMware dispose de partenariats avec les principaux fondeurs du marché, mais c’est avec Nvidia que les avancées semblent les plus intéressantes.
Ainsi, dans la version 5.1 de VCF, il sera possible de disposer de 16 GPU par machine virtuelle au lieu de 8 actuellement. Les capacités de stockage vont, pour leur part, être multipliées par quatre, et une offre vSAN Max sera proposée avec la possibilité de gérer des unités de stockage sur une échelle du pétaoctet.
Le déploiement et la gestion des applications se voient renforcés avec Tanzu Application Engine (annoncé en version bêta privée à VMware Explore Las Vegas en août dernier). Ce moteur est conçu pour introduire une couche d’abstraction centrée sur les applications afin qu’elles s’exécutent avec une gouvernance opérationnelle et une conformité cohérentes au sein d’un cloud ou de plusieurs clouds.
Sans doute bridé par les interrogations autour du rachat par Broadcom, VMware Explore est malgré tout resté assez sobre en matière d’annonces produits, et encore plus du côté partenaires, du moins officiellement, car aucun interlocuteur de la marque liée au channel n’est intervenu devant la presse. Si Hock Tan a tout de même pris la peine de réaffirmer l’importance de l’écosystème indirect, il faudra encore attendre pour en savoir plus sur la stratégie de l’éditeur dans ce domaine.
Des ingénieurs avant-vente formés pour accompagner les partenaires
Ce n’est pas une annonce faite à VMware Explore mais une découverte au détour d’une interview : l’éditeur dispose depuis cinq ans d’un centre à Barcelone, au sein duquel il forme chaque année quelques dizaines d’ingénieurs avant-vente. « Nous n’en avons quasiment pas parlé mais c’est un vrai succès, et près d’une centaine d’ingénieurs issus du centre sont d’ores et déjà sur le marché. Les deux tiers des entreprises peinent à trouver les talents pour gérer le coût et accélérer l’innovation, et ça bride leur capacité à innover », explique Alex Matthews, Senior Director Solution Engineering Partners & Digital de VMware EMEA.
Une aubaine pour le channel de l’éditeur car les « avant-vente » formés, bien que restant dans le giron de VMware, sont dédiés à l’accompagnement des partenaires auprès des clients. « Ils sont formés pendant cinq ans aux technologies de la marque, avec une grande réactivité puisque pratiquement tout ce qui est annoncé lors d’événements, comme VMware Explore, est ajouté au cursus. De plus en plus de femmes rejoignent ce programme.
Cette année, nous avons quasiment atteint la parité », souligne Alex Matthews.