manipulations dans un datacenter

L’indispensable sécurité physique des centres de données

À l’ère de la numérisation, les data centers sont des espaces qu’il convient de sécuriser physiquement. Avec la multiplication de ces infrastructures, l’enjeu est devenu prioritaire.

Fév 2024
Par Thierry Bienfait

Des infrastructures de stockage numérique, avec leurs salles entreposant des cages où commutateurs et autres routeurs reliés par des chemins de câbles multicolores vrombissent. En ces lieux pourtant sous haute surveillance, les hébergeurs ont peur de tout : des ondes qui risquent de perturber les fragiles données ; de l’eau susceptible de les court-circuiter ; du feu qui pourrait les ravager, sans oublier la chaleur qui représente un danger pour l’équipement et entraîne une surconsommation pour le refroidissement. Il faut se méfier des orages et de la foudre, exposant potentiellement à une interruption de l’alimentation électrique, mais aussi des voleurs et des terroristes.

Les risques encourus

Au final, on s’interroge. Les centre de données ne seraient-ils pas des machines à fabriquer des scénarios catastrophes improbables ? Même si ce n’est pas fréquent, l’accident se produit. « À Paris, il y a quelques années, un centre mal géré a annoncé plus de capacité électrique qu’il ne pouvait en supporter. Le jour où un onduleur est tombé en panne, les coupures de courant se sont enchaînées pendant soixante douze heures », témoigne un fournisseur cloud. Présentés comme particulièrement résilients par les promoteurs de l’informatique en ligne, les centres de données ont subi ces derniers temps une série de pannes qui pourraient interroger les nombreux clients qui leur louent des serveurs à distance.

Même les géants du secteur doivent admettre qu’il peut arriver des indisponibilités de leurs technologies, qui provoquent des ralentissements préjudiciables à l’activité de la clientèle. « La taille que prennent les plates-formes cloud et le lot de complexités qui accompagnent leur croissance rendent ces pannes inévitables », analyse Amber Villegas Williamson, Senior Consultant chez Uptime Institute.

Pour elle, les pannes ne sont pas une nouveauté. Toutefois, l’une des promesses initiales du marché
du cloud a pris du plomb dans l’aile à la suite d’événements récents qui se remarquent davantage dès lors qu’ils concernent des leaders tels qu’AWS, Microsoft Azure ou Google Cloud. Personne n’a oublié l’incendie qui a ravagé les serveurs du site strasbourgeois d’OVHcloud – alors que l’entreprise d’Octave Klaba y avait déjà été victime d’une panne électrique en 2017. Le genre de catastrophe qui pose question.

Conséquences financières

Selon le consortium Uptime Institute, un sinistre ou une panne dans un data center a des répercussions financières lourdes concernant le matériel, les pertes de données et d’exploitation. « L’indisponibilité d’applications hébergées, tels les logiciels de facturation ou d’enregistrement de commandes, coûte en moyenne 300 000 dollars par heure pour des multinationales. L’addition peut grimper jusqu’à cinq millions de dollars par heure ! » Même si les incidents sont envisagés dans les contrats, les plates-formes cloud jouent leur crédibilité lorsqu’elles promettent des SLA (service-level agreements) ambitieux, prévoyant les fameux 99,99 % de disponibilité, soit seulement huit heures de panne par an.

De fait, les centres d’hébergement n’ont pas le droit à l’erreur. Le prédictif, qui consiste à anticiper des défauts et des risques en recourant à l’intelligence artificielle, figurait fort logiquement cette année parmi les tendances technologiques dévoilées au salon Data Centre World, qui s’est tenu en novembre dernier à Paris. Quelle que soit la cause du problème, des dispositifs existent pour éviter les plus gros risques.

Les coûts cachés

Avec les data centers, le cloud peut engendrer des coûts inattendus. C’est ce que montre une étude européenne menée par le fournisseur de services informatiques managés Sungard Availability Services. En France, sur les douze derniers mois, les coûts de maintenance et d’imprévus dans les centres de données atteindraient 1,46 milliard d’euros pour les entreprises. Le panel de 150 professionnels interrogés estime en moyenne à 570 000 euros par entreprise les dépenses non planifiées. Seulement 47 % de ces entreprises ont réussi à réduire leurs coûts.