Comms unifiées et cloud

Ascension lente mais progressive dans les communications

Les solutions de comms unifiées dans le cloud se déploient lentement mais sûrement dans les entreprises, lesquelles demandent à leurs partenaires intégrateurs de plus en plus d’intermédiation entre les outils.

Fév 2023
Par Benoît Huet

Lors de son événement de décembre 2022, le CDRT dressait un bilan global des télécommunications en France. Résultat : nous assistons à une lente mais durable pénétration du cloud dans le secteur des communications. Le Club s’est notamment appuyé sur les chiffres du cabinet d’analyses britannique Cavell Group, qui a mené une étude sur 400 organisations en France.

Ainsi, la part du cloud est estimée, pour 2021, à environ 10 % en France pour des revenus avoisinant les 300 M€. La projection pour 2025 s’établit, quant à elle, à 25 % pour 800 M€ de C.A. C’est peu quand on compare aux marchés néerlandais et surtout britannique par sa taille (30 % pour 800 M€ en 2021 et pour 2025, plus de 50 % pour 1,8 Mds €).

Mais le marché français, comme le marché allemand d’ailleurs, bénéficie toujours d’une base installée historique des grands opérateurs et équipementiers de PABX et PBX. Cela étant, les choses évoluent, et les entreprises, quelle que soit leur taille, sont toujours plus nombreuses à aller vers des applications plus flexibles en mode cloud. Ce dernier « permet d’offrir aux PME des services historiquement réservés aux grands comptes », avance Bertrand Pourcelot, directeur général d’Enreach for Service Providers.

En complément du cloud, ce dirigeant met en avant le smartphone, perçu comme un catalyseur de l’innovation et des usages. « Les modes de travail obligent les entreprises à basculer dans des systèmes agiles portés par le cloud et compatibles avec l’ensemble de leurs solutions métier et collaboratives », indique de son côté, Jean-Baptiste Pecchi, Country Manager de Dstny France.

Parmi ces applications collaboratives, les adoptions massives de Zoom et de Teams sont le parfait exemple. Cette dernière est d’ailleurs souvent considérée comme un accélérateur (mais aussi de plus en plus comme un concurrent) pour nos deux interviewés. à noter que leurs entreprises respectives, par leurs solutions UCaaS, se positionnent comme des alternatives européennes aux plates-formes américaines, toutes deux dans une logique de partage de valeur avec les partenaires.

D’un côté, Enreach est forte de deux offres bien identifiées : Enreach UP (pour remplacer la plate-forme Istra), qui cible les opérateurs et les services providers ; et Enreach Contact, sa solution en mode SaaS. De l’autre côté, Dstny avec Dstny UcaaS, une plate-forme lancée officiellement fin 2022.

Bertrand Pourcelot - Enreach for Service Providers

« Comme le cloud, le smartphone participe activement à cette révolution des usages »

Bertrand Pourcelot, directeur général de Enreach for Service Providers

Mieux s’intégrer aux applications métier

Si l’interconnexion avec Teams est presque devenue une obligation pour les éditeurs, les efforts se portent aussi vers l’interopérabilité avec les applications métier. « Les entreprises exploitent déjà en interne de nombreuses applications métier dans le cloud, et les solutions UCaaS se doivent de s’interfacer avec elles ; nos partenaires revendeurs veulent ces interactions. Pour y répondre, Dstny propose donc une plate-forme ouverte via des connecteurs, et une dizaine de grands acteurs du marché du CRM nous font déjà confiance. De plus, nous disposons du programme Alliance destiné aux acteurs locaux qui souhaitent certifier leurs offres sur notre plate-forme, laquelle devrait aussi s’enrichir d’API d’ici au troisième trimestre 2023 », détaille Jean-Baptiste Pecchi.

Le sujet des interfaces de programmation d’application et des connecteurs a été abordé lors d’une table ronde organisée par le CDRT. Julien Rickauer, directeur général de Wazo, a rappelé l’importance d’une plate-forme apéisable facilitant les interactions. D’ailleurs, toutes les fonctionnalités de la plate-forme Wazo s’appuient sur des API (environ 450) que tout partenaire peut utiliser.

De son côté, Erwan Salmon, Country Manager France de RingCentral, revendique 5 000 connecteurs pour quelque 70 000 développeurs dans le monde. Il donne en exemple le déploiement d’un vaste projet d’intégration avec Dynamics 365 (9 000 postes) chez l’un de leurs clients. En outre, la souplesse du cloud facilite la convergence des offres, notamment entre les UCaaS et les CCaaS (Contact Centers as a Service).

« Nous constatons, depuis deux ans, un rapprochement des solutions liées à la voix, à la vidéo, au collaboratif et au centre d’appels. Chez Enreach, nous parlons de technologies de contact, et le cloud permet cette unification et cette accessibilité, notamment pour les PME », relève Bertrand Pourcelot, chez Enreach.

Ce constat se généralise chez un grand nombre d’éditeurs : RingCentral déjà, avec les offres Engage Digital et Contact Center (CC) sur son partenaire éditeur Nice, sans oublier sa plate-forme phare MVP dotée de fonctionnalités CC ; ensuite, Wisper, éditeur de la plate-forme Xivo Design qui progresse encore vers des usages verticalisés autour du centre de contacts.

Jean-Baptiste Pecchi - Dstny France

« Nos partenaires veulent plus d’interactions ? Ils les trouvent sur notre plate-forme ouverte Dstny UCaaS »

Jean-Baptiste Pecchi, Country Manager Dstny France

le matériel à la demande

Le modèle Hardware as a Service, qui consiste à ne plus acheter les équipements matériels – de toute façon voués à l’obsolescence d’ici à cinq ans – fait son chemin dans le domaine des télécoms et réseaux. Avec ce mode de consommation, les mises à jour sont souvent à la charge du fournisseur, pas de l’entreprise. Quant aux partenaires, ce modèle leur fait bénéficier de revenus récurrents.

Cette façon de consommer le matériel, Wildix l’a adopté depuis plus de trois ans. Lors du Partner Event Wildix France à Marseille, Wildix annonçait même une hausse de 28 % de son mode de consommation Hardware as a Service. De son côté, Alcatel-Lucent Enterprise (ALE), par son large portfolio, du switching aux PBX en passant par les solutions UCaaS avec Rainbow, s’ouvre de plus en plus vers une approche globale du mode as a Service.  

« Il faut créer cette interaction entre les périphériques et les outils. L’enjeu passe donc par l’adoption d’un écosystème complet, d’une solution de bout en bout, et nous sommes capables d’y répondre. L’Opex apporte une manière différente de consommer des techniques avec sa souplesse financière », précise Sylvain Lecoustey, directeur général France d’ALE. Cela se traduit chez ce fournisseur par des offres de NaaS (Network as a Service), par les solutions de communication Rainbow, mais aussi par l’offre Purple On Demand.  Cette dernière donne la possibilité aux partenaires d’acheter un OXE en mode souscription. à noter qu’en la choisissant, cette solution peut être déployée sur le site du client, hébergée chez un tiers, ou dans un cloud privé.

Sylvain Lecoustey - ALE

« Par notre approche as a Service de bout en bout, nous offrons cette souplesse de consommer selon les besoins »

Sylvain Lecoustey, directeur général France, Alcatel-Lucent Enterprise

des postes IP en berne avec le cloud ?

Le cloud sonnera-t-il le glas des ventes de postes IP ? Pour Fabrice Bertholot, Regional Sales Manager chez Poly I HP, le PC est devenu le poste de communication privilégié, auquel il rapproche la forte demande en casques. Damien Geffray, VP de l’intégrateur Encom Conseil, abonde dans ce sens : « De moins en moins de clients nous demandent de poste fixe. » Résultat : 80 % des ventes sont des casques ; 20 % des postes téléphoniques.

Un constat que relativise Sylvain Lecoustey, directeur général France d’ALE. « Nos ventes ont très légèrement diminué, mais nous sommes dans une vague de renouvellement post-Covid où l’on souhaite bénéficier d’une qualité audio supérieure, mais aussi d’une liberté d’écoute en mains-libres, bien plus agréable qu’un casque. Et puis, le ROI est vite perceptible : un bon casque coûte plus cher qu’un poste tandis que sa durée est de deux ans ou trois ans, contre sept à neuf pour un poste. »  Frédéric Archimbaud, directeur commercial de  Mitel, lui, rappelle l’adoption plus significative pour les DECT dotés d’une excellente couverture du signal, et pour les téléphones intelligents. Ces derniers compenseraient la baisse des ventes des traditionnels postes IP.