Travailler avec plusieurs écrans

L’écran, ce nouveau hub du bureau

Pour l’utilisateur, l’écran devient le périphérique principal sur le bureau. Il faut dire que l’écran d’aujourd’hui ne manque pas d’atouts. Malgré cela, les ventes d’écrans ont chuté en 2023.

Avr 2024
Par Benoît Huet

Selon nos interlocuteurs, les tailles d’écran les plus demandés varient entre 24 pouces (plus de 60 cm de diagonale) et 27 pouces (plus de 68 cm). Plutôt des grandes tailles sachant que l’espace de travail tend à diminuer. « Certes, les espaces de travail se réduisent mais les bureaux sont de plus en plus partagés par les collaborateurs. En ce sens, les entreprises privilégient leur confort en optant pour des écrans de plus grande taille et en réduisent le nombre. Nous constatons même une plus forte demande sur les modèles de 34 pouces pour faire du multifenêtrage », indique Pierre Leonard, Country Manager France Philips et AOC.

Certains utilisateurs préfèrent en effet un seul écran de grande taille plutôt que deux plus petits positionnés l’un à côté de l’autre. D’autant que plusieurs fabricants proposent des outils logiciels permettant de personnaliser l’environnement de travail en multifenêtrage et de le retrouver tel quel à chaque connexion. C’est le cas de Philips avec son outil SmartControl.

Le multifenêtrage est désormais proposé en standard dans Windows 11, donc, à l’avenir, plus besoin d’outils add-ons. Quant aux modèles de grande taille, ils sont prisés pour faire du partage d’informations dans les salles de réunion ou de vidéoconférences. Pour certains, ce sont des écrans all-in-one, embarquant Teams ou Zoom préinstallés et dotés d’une caméra couplée parfois à un système de captation audio.

À l’opposé, d’autres secteurs réclament des écrans de taille inférieure, comme l’éducation ; les écoles achètent surtout des modèles de 22 pouces car, au-delà, les professeurs ne voient plus très bien leurs élèves. Pour Cassandre Toutin, chef de produit sur la partie LCD chez BenQ, pour le marché de l’éducation le prix reste un argument important dans le choix du moniteur. Les écarts entre les modèles de 24 pouces et 27 pouces deviennent peu significatifs, de l’ordre de 15 à 20 euros.

À la démocratisation des grandes tailles s’ajoute une résolution qui augmente, notamment vers du 2K (2 048 x 1 080 pixels) et de plus en plus vers du 4K (3 840 x 2 160). BenQ envisage même de lancer à la fin de l’année un écran en 5K (5 120 × 2 880) dédié à l’univers graphique.

Concernant les dalles, la technologie LCD/LED (IPS, VA) domine toujours dans l’entreprise, l’OLED étant plutôt voué au grand public, à l’affichage dynamique et au gaming. « La technologie rétroéclairage micro-LED devrait se démocratiser à terme. Aujourd’hui, elle reste encore trop onéreuse », constate Frédéric Serafin, directeur général France d’Iiyama.

« Les entreprises privilégient le confort avec des écrans de plus grande taille et en réduisent le nombre »

Pierre Leonard, responsable manager France Philips et AOC
Pierre Leonard - Philips AOC

L’USB-C en voie de généralisation

L’interface USB-C se généralise sur tous les écrans, un seul câble peut avoir accès à toutes les ressources. Plus besoin de chargeurs, de cordons d’alimentation ni de câbles de signal ; le bureau gagne en espace puisqu’il n’est plus nécessaire d’avoir une station d’accueil externe. Tout est intégré dans l’écran y compris l’interface RJ45. Celle-ci sert, par exemple, de passerelle aux PC portables pour bénéficier d’une connexion internet stable ou avoir accès à ses ressources via le LAN de l’entreprise.

Pour Pierre Leonard, le moniteur devient le hub central pour l’alimentation des appareils. À noter que certains moniteurs sont désormais équipés d’un connecteur Thunderbolt 4, qui pourrait remplacer définitivement l’USB-C dans les années à venir. La technologie Thunderbolt 4 permet un transfert de données ultrarapide à 40 Gbits/s, fournit jusqu’à 90 watts d’alimentation aux périphériques externes
et assure une connexion Ethernet stable de 1 Gbit/s.

L’ergonomie dans la conception des moniteurs est également un point différenciant pour Tarik Hamza, chef de produit LCD chez Asus : « Par exemple, pour notre gamme d’écrans mobiles ZenScreen, nous intégrons plusieurs caractéristiques ergonomiques telles qu’une béquille dépliable, qui permet de maintenir l’écran incliné de 12 à 60 degrés, garantissant des angles de vision confortables, ou un kit de crochets de cloison, afin de libérer un espace précieux en accrochant le ZenScreen aux parois du bureau. »

Les écrans professionnels n’échappent pas à la tendance de l’écoresponsabilité. Des efforts ont été réalisés pour réduire l’emballage. « Chez Philips et AOC, nous utilisons du carton de boîtes à œufs et avons banni le plastique, le polystyrène ainsi que le manuel papier. Nous avons créé une petite trappe d’ouverture dans le carton d’emballage pour glisser le bon câble, qui correspond aux normes du pays ; les utilisateurs n’auront donc plus à jeter les autres câbles jamais utilisés », explique Pierre Leonard.

Iiyama met également en avant des gammes écoresponsables avec des emballages plus compacts en carton recyclé et l’emploi accru de matières recyclées (acier de châssis, plastiques…) dans la fabrication. « Nous avons définitivement supprimé le port VGA, ce qui nous permet de gagner quelques points sur la consommation. Nous choisissons des composants moins énergivores, nous arrivons d’ailleurs à proposer des moniteurs classés B en énergie », précise Frédéric Serafin.

Chez Acer, le plastique utilisé provient de morceaux récupérés des océans et les emballages sont en papier 100 % recyclable. Quant à Asus, le fabricant fait valoir ses certifications environnementales telles que Epeat Silver, voire Epeat Gold pour certaines séries, et la mise en œuvre d’emballages écologiques certifiés par FSC Mix.

Des écrans plus économes en énergie

Des efforts ont également été portés sur les économies d’énergie, même si un écran n’en consomme pas énormément, de l’ordre de 15 à 16 watts pour un modèle de 24 pouces et aux alentours de 20-25 watts pour un 27-pouces.

Grâce aux capteurs et aux technologies intégrés par les constructeurs, il est toujours possible d’abaisser la consommation en réduisant automatiquement la luminosité de l’écran dès que l’utilisateur s’en éloigne, en adaptant la luminosité à l’éclairage de la pièce ou en l’éteignant en l’absence de l’utilisateur. Ces dispositifs permettent parfois de générer jusqu’à 75 % d’économie d’énergie.

En outre, les fabricants conçoivent des écrans destinés à de nouveaux usages. Citons Asus qui propose toute une série de modèles portatifs dans sa gamme ZenScreen, ou Philips qui a présenté ces écrans mobiles autoalimentés en USB-C en 16 pouces lors du dernier salon IT Partners. Ces moniteurs nomades conviennent par exemple à des commerciaux en déplacement qui souhaitent plugger un deuxième écran à leur ordinateur portable pour plus de confort d’affichage quand ils tapent leur rapport le soir à l’hôtel.

De son côté, BenQ a lancé deux nouveaux segments, selon Cassandre Toutin : « Dès ce mois d’avril, nous mettons sur le marché des écrans dédiés aux programmeurs avec une colorimétrie renforcée et un rétroéclairage et, à partir du troisième trimestre, nous lancerons une gamme dédiée aux utilisateurs de Mac. »

Enfin, nous constatons également l’adoption dans l’entreprise, certes encore timide, des écrans habituellement dédiés au gaming. Ce sont surtout des entreprises liées à la création (design, montage vidéo, utilisateurs de la suite Adobe…) qui réclament des moniteurs de 144 Hz que l’on retrouve dans le secteur du gaming. À noter toutefois que le 100 Hz s’est déjà généralisé dans le monde de la bureautique.

Les ventes de moniteurs en berne en 2023

Selon le cabinet d’études IDC, depuis la fin de la crise sanitaire, le marché mondial décroît. Les ventes de moniteurs sont passées de 145 millions d’unités environ en 2021 à un peu plus de 120 millions en 2023. Elles devraient se stabiliser entre 120 et 130 millions d’unités jusqu’en 2027.

Ventes mondiales PC

Toutes les régions du monde sont concernées, notamment l’Amérique du Nord et l’Europe qui affichent les chutes les plus significatives. Parmi les raisons de cette décroissance, IDC avance la faible demande et les incertitudes macro-économiques. En volume, si l’on se réfère aux données d’IDC, cinq acteurs dominent le marché mondial au deuxième trimestre 2023, à savoir, par ordre d’importance : Dell, TPV (Philips/AOC), HP, Samsung et Lenovo.

Pour la France, le marché a enregistré une baisse de 30 % en volume au premier semestre 2023, selon les chiffres de Context établis à partir des données des fabricants. Quant au prix d’un écran, il a baissé de 20 % en moyenne en 2023.