Caméra IP de vidéoprotection

L’IT lorgne sur les caméras et le channel zoome sur les performances

Les caméras de vidéoprotection se sont imposées dans tous les secteurs. Elles se dotent des technologies les plus sophistiquées. Voici un segment devenu un relais de croissance à fort potentiel pour la filière numérique.

Jan 2022
Par Thierry Bienfait

Le débat fait toujours rage. Les opposants à la vidéoprotection y voient l’oeil de Big Brother. D’autres ont pour elle les yeux de Chimène, tels les acteurs du numérique qui intègrent leurs technologies dans les caméras. Pour ceux-là, les affaires se portent à merveille. Les critiques ne manquent pas sur cet outil de surveillance « détourné par l’État policier », mais ces industriels n’en ont cure. Les caméras se multiplient et se dotent de moyens techniques de plus en plus pointus. Dopé à la reconnaissance faciale, le réseau de vidéosurveillance installé dans la ville d’Atlanta et son agglomération a, par exemple, permis d’arrêter près de 2 000 fugitifs en deux ans, rapportent les autorités, cités par le magazine Wired. Dès l’année prochaine, il sera capable de couvrir l’intégralité des lieux publics dans les zones urbaines d’Atlanta- Sandy Springs-Roswell et d’Augusta- Richmond County, « en scannant toute la population en quelques secondes. Et cela, quels que soient l’angle et la luminosité ». L’été dernier, le journaliste de Wired a testé le système en mettant au défi de le retrouver, à partir d’une photo remise à la police d’Atlanta. Huit minutes auront suffi aux caméras de la ville pour le localiser et lancer les forces de l’ordre à ses trousses. Au-delà de cet usage, le champ d’application des caméras de vidéoprotection touche de nombreux autres domaines de la vie quotidienne.

39 Mds $
de recettes mondiales ont été réalisés par les revendeurs en 2021

Source : estimation Markets & Markets (caméras de sécurité)

SOURIEZ, MÊME AVEC UN MASQUE

Ainsi, les badges d’accès cèdent peu à peu du terrain aux caméras intelligentes. Les modèles PopEntry, du californien PopID, donnent accès aux employés d’une entreprise à leur lieu de travail sans autre dispositif de contrôle que la reconnaissance faciale intégrée. Même si la protection des données et de la vie privée bride encore ce genre de technologie, des projets sont à l’état expérimental dans le secteur bancaire, pour remplacer les cartes de retrait aux distributeurs automatiques, ou encore dans les aéroports, pour éliminer les cartes d’embarquement. C’est surtout dans le commerce que l’avenir des caméras à reconnaissance faciale serait le plus prometteur. PopID a installé les siennes dans plus de 100 restaurants. Depuis l’été dernier, 15 fast-foods KFC de Los Angeles emploient la solution Smile to pay. L’application, alimentée par la technologie Alipay, ferait économiser jusqu’à dix minutes de temps d’encaissement dans ces restaurants. Par ailleurs, une ligne du métro de Séoul teste un système constitué de caméras intelligentes qui évite aux passagers d’utiliser une carte ou un smartphone pour payer leurs tickets, sans retirer leurs masques.

« Se développer sur ce marché, signifie évoluer vers la gestion du matériel, par la location longue durée »

Hervé Guillou, président du Conseil des industries de la confiance et de la sécurité (CICS)

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caméras de surveillance IP

Grâce à l’intelligence artificielle et à des algorithmes de comptage ou de cartographie des flux de circulation, on étudie les allées et venues des clients en magasin. On recense les rayonnages les plus fréquentés, et les produits devant lesquels s’arrête la clientèle, les temps d’attente à la caisse, etc., et même le profil du client (jeune ou âgé, homme, femme ou enfant). Avec certains systèmes, il est devenu facile de coupler la vidéoprotection avec l’affichage de messages promotionnels par le digital signage. Enfin, pour les autoroutes ou les contraventions, les caméras incluent la technologie d’intelligence artificielle LPR pour relever les plaques minéralogiques (voire le type de véhicule), et traiter le lieu ou l’heure de captation des données. Sur ces marchés à fort potentiel, la croissance des bénéfices équivaut à la vitesse de déploiement des caméras à technologie IP. La filière du numérique a flairé le bon coup. Bien que beaucoup d’acteurs conservent jalousement leurs chiffres de ventes, les cabinets d’études avancent entre 28 Mds $ et 51 Mds $ en 2020. Selon Strategy Analytics, on compte, au niveau planétaire, 1 milliard de caméras de sécurité dans l’espace public (contre 770 millions en 2019). Et leur nombre devrait croître de 30 % en 2022, prévoit l’institut IHS Markit. Sans parler des efforts marketing, l’une des principales raisons du succès rencontré par les caméras IP de vidéoprotection professionnelles tient à leurs hautes performances. En effet, les fournisseurs améliorent la qualité de la définition, le spectre de la plage dynamique, la vision nocturne. À l’instar de n’importe quel domaine dans l’IT, la technologie n’en finit plus d’évoluer. Voilà que les caméras sont devenues sensorielles. De jour comme de nuit, elles détectent tout mouvement sur l’image, lequel active l’enregistrement. Les modèles antivandalisme, eux, déclenchent une alarme lorsqu’ils sont dégradés ou désorientés. Les équipements sont adaptés aussi bien aux besoins pour la surveillance de la voie publique, la sécurité des banques, la lutte contre les vols dans les points de vente, la protection des entrepôts, des sites sensibles, etc. Dans la grande majorité des cas, une installation performante réclame l’intervention d’un professionnel. Outre l’aspect juridique à prendre en compte, il faut réaliser une prestation complète, depuis l’audit jusqu’à l’installation sur mesure des caméras, en passant par la mise en place du réseau de transmission des images, par câble, fibre optique, WiFi ou 3G – 5G si nécessaire. « Les professionnels doivent s’adapter aux nouvelles technologies et se diversifier sans cesse. Il est important de se constituer une clientèle variée, ne pas se focaliser sur une seule typologie, comme la surveillance des centres commerciaux ou des prisons, recommande Hervé Guillou, le président du CICS.¹ Si l’on souhaite se développer sur ce marché, il faut aussi évoluer vers la gestion du matériel, à travers la location longue durée. Cette activité se développe dans des secteurs tels que les projets urbains, les entrepôts logistiques, les copropriétés ou les écoles. » À en juger par la fréquentation d’un salon comme Expoprotection Sécurité, qui a dépassé le nombre de 6 400 visiteurs cette année, le secteur pourrait connaître un fort rebond l’an prochain, après avoir enregistré son premier recul en France en 2020, consécutivement à la pandémie.

+30 %
de caméras dans l’espace public d’ici à 2022

Source : IHS Markit

CICS : Conseil des industries de la confiance et de la sécurité