Changement de président à la fédération Eben
Un passage de relais qui coïncide avec la transformation des marchés de la papeterie, de l’impression, des fournitures de bureau et des solutions informatiques et télécoms depuis la révolution du télétravail.
Juil 2024Par Thierry Bienfait, à Marseille
L’association des professionnels de la papeterie, de l’impression, des fournitures de bureau et des solutions informatiques et télécoms Eben a tenu en juin à Marseille l’une de ses conventions nationales les plus importantes, avec le passage de témoin entre Loïc Mignotte et Arnaud Velthuizen.
Loïc Mignotte, qui en avait pris les commandes en 2018, cède son siège de président au terme de son second mandat, en revendiquant un bon bilan. Sous son impulsion, Eben est passé de 2 000 adhérents en 2018 à plus de 2 500 cette année, soit un quart des 10000 entreprises appliquant la convention collective de la branche. « Une performance dans la conquête d’adhérents d’autant plus remarquable que les différents secteurs de notre marché connaissent un fort mouvement de concentration entre leurs acteurs », souligne-t-il.
Arnaud Velthuizen (à g.) succède à Loïc Mignotte (à dr.) à la tête de l’association professionnelle Eben.
L’organisation patronale représentative de la branche s’est également attelée à leur faciliter le recrutement de talents tech. Ses efforts ont porté sur l’apprentissage et les formations diplômantes, en partenariat avec l’Opcommerce ainsi qu’avec la Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation professionnelle : des cours techniques et commerciaux (intégralement financés dans la plupart des cas) répondant à des besoins en compétences clés identifiés dans la branche Eben, par exemple pour l’administration de systèmes et réseaux, la maîtrise des tendances dans l’aménagement d’espaces de travail, la prospection à distance…
L’accent a en outre été mis sur l’aide que la fédération apporte à ses membres en défendant les intérêts de la profession, en particulier auprès de la puissance publique, mais aussi en favorisant les échanges entre pairs et en multipliant les rencontres avec les donneurs d’ordres afin de faciliter l’accès des PME à la commande publique.
Ces services d’accompagnement dans le développement de l’activité des entrepreneurs distributeurs sont complétés par des ateliers pour appréhender des thèmes complexes tels que les obligations juridiques des dirigeants d’entreprise, des sujets « métier », comme la législation s’appliquant au numérique, la cybersécurité ou l’intelligence artificielle. Par ailleurs, en 2020, dans un contexte où le rapport au bureau a évolué, les locaux parisiens d’Eben ont été réaménagés selon des pratiques plus conviviales pour réenchanter l’immobilier d’entreprise tertiaire. L’engagement RSE est devenu un enjeu stratégique.
« Depuis la loi Agec, l’intégration de considérations environnementales est systématique dans l’ensemble des marchés publics, relève Loïc Mignotte. Les distributeurs en bureautique et numérique doivent aligner leurs offres sur des exigences écologiques. »
Un autre axe de travail important a concerné la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT évaluée avec un label EV3), dont les enjeux doivent être mis en perspective avec les aspirations des nouvelles générations de salariés.
L’organe de direction d’Eben a été renouvelé pour trois ans.
De g. à dr. : Rémy Cognet (collège Copieurs et solutions d’impression), Sébastien Morin (secrétaire), Jérôme Elmalek (Fournitures de bureau et scolaires, papeterie et loisirs créatifs), Jean-Pierre Delpérié (Social et formation), Thierry Grillot (Mobilier de bureau et aménagement d’espaces), Loïc Mignotte (trésorier), Arnaud Velthuizen (président), Christophe Videau (Impression numérique et reprographie) et Vincent Dufort (IT, télécoms et réseaux).
L’heure de la transition
Ces stratégies d’Eben dans les problématiques sur la QVCT, l’écologie, la communication et l’accompagnement devraient s’inscrire dans la continuité avec Arnaud Velthuizen. « Au poste de secrétaire au conseil d’administration du syndicat, il a constamment été en prise directe avec les adhérents. Il le restera certainement comme président », commente l’une des 130 personnes présentes à son intronisation officielle.
Arnaud Velthuizen, né à Bruxelles il y a 49 ans, a tracé son sillon dans le monde de la high-tech chez Kyocera France, puis chez C’Pro, devenu Koesio, pour en diriger l’activité impression. En quête de nouvelles expériences, l’homme place l’audace parmi les qualités humaines qu’il apprécie le plus. Sur le plan stratégique, il devra probablement en faire preuve. Si la fédération s’est agrandie ces dernières années, avec le regroupement de la Fédération de l’équipement du bureau et de la Fédération interprofessionnelle de la communication d’entreprise puis l’intégration du Syndicat de l’impression numérique, la filière a connu son lot de mauvaises surprises.
En 2020, elle a été confrontée à la pandémie de Covid dont les effets économiques se font encore sentir. L’immobilier de bureau bat de l’aile et de nombreux sites tertiaires sont depuis en perte de vitesse. Selon une enquête menée par la société de conseil JLL, 66 % des entreprises interrogées durant le confinement, en avril 2020, envisageaient de généraliser le télétravail et 28 % de réduire leur empreinte au sol. Une tendance causée aussi par la crise économique, qui pousse les entreprises à faire la chasse aux mètres carrés de bureau inutiles au profit du flex office et du coworking.
Selon Anthony Orsonneau, dirigeant de l’entreprise Arbet Aménagement et ancien vice-président du collège Mobilier de bureau et aménagement d’espaces à la fédération Eben, « le bureau n’est pas mort. Ce n’est pas demain que les télétravailleurs disposeront chez eux de tous les outils mis à disposition au sein de l’entreprise ».
Une récente étude du cabinet Deloitte indique que le taux d’occupation moyen des postes de travail est compris aujourd’hui entre 40 % et 60 %, principalement à cause du télétravail. C’est un sujet de préoccupation pour les chefs d’entreprise, sachant qu’« en Île-de-France [par exemple], un poste de travail coûte entre 5 000 et 18 000 euros du mètre carré hors taxes à l’année », estime Deloitte.
Les opportunités de marché à saisir
Cette révolution du « bureau » est allée de pair avec un autre phénomène. Après avoir connu une croissance record en 2020 (entre 4,8 % et 13 %, selon les cabinets d’études), le marché du PC a enregistré en 2022 une chute historique de près de 20 % à l’issue de la pandémie. En 2023, cette tendance baissière s’est confirmée quoique plus modérée, presque – 3 % selon Gartner : « Compte tenu des incertitudes économiques et géopolitiques, les entreprises sont devenues plus sélectives dans leurs dépenses en matière d’informatique et les PC ne sont plus leurs priorités premières. »
Sans surprise, le matériel d’impression a lui aussi affiché un net repli, victime de la tendance no paper. Face à cette contraction de la demande, la filière a réorienté ses activités vers les services de gestion d’impression. Une stratégie payante, puisque le MPS avoisine les 10 % de croissance, notamment pour les réseaux de partenaires revendeurs de Canon, Ricoh, Toshiba ou Xerox. Confrontés aux soubresauts du secteur du numérique, l’écosystème des professionnels adhérents d’Eben peut tabler sur d’autres opportunités pour réévaluer à la hausse les prévisions de chiffre d’affaires. La transformation digitale des entreprises serait toujours au programme, d’après les analystes, qui prévoient une accélération des investissements dans des secteurs tels que la sécurisation des systèmes d’information, le réaménagement des bureaux en espaces de coworking, l’installation de salles de réunion virtuelle et les nouveaux systèmes de visioconférence. Autant de segments de marché appelés à croître de 12 à 20 % par an en Europe, estime la société de conseil Frost & Sullivan.
Enfin, Eben note le souci croissant des dirigeants d’entreprise de ne plus décorréler la RSE du numérique. « Des efforts restent à fournir visant à plus de parité au sein des instances dirigeantes dans nos métiers, notamment au conseil d’administration de notre fédération, exclusivement masculin », fait remarquer un adhérent. Le défi n’est donc pas si simple à relever. Pour apporter la preuve de leur démarche d’amélioration continue, les entreprises n’auront d’autre choix que de se doter des technologies permettant de concevoir des plans d’action et d’en mesurer les résultats, comme le propose Eben avec le label EV3 pour ses adhérents.
Des temps moins difficiles
Quels sont les clignotants qui donnent le moral à un chef d’entreprise ou des cauchemars ?
La dernière enquête de conjoncture menée par Eben entre les 5 et 23 avril 2023 auprès de 85 sondés passe en revue leurs prévisions de croissance, de stagnation ou de diminution, avec des questions portant sur l’évolution de l’activité, l’état de la trésorerie ou le recrutement. Face au ralentissement économique en France, 34 % des dirigeants anticipaient pour le premier semestre 2023 une hausse de chiffre d’affaires.
Un an plus tôt, ils étaient 29 % à le prévoir. Par ailleurs, 13 % des entreprises interrogées peinaient à recruter au premier semestre 2023, contre 24 % un an auparavant. Toujours pour le premier semestre 2023, elles étaient 32 % à déclarer une situation de trésorerie tendue, soit quasiment le même résultat que l’étude de 2022 (33 %). Enfin, 21 % des patrons sondés en 2023 ont répondu que la situation économique globale s’était dégradée, un pourcentage qui atteignait 24 % en 2022.