Olivier Savornin – DG VMware France – Maître d’oeuvre de la convergence
Avenant et volubile, Olivier Savornin capitalise autant sur son appétence pour la technologie que sur son expérience commerciale acquise auprès des clients finaux et des partenaires.
Oct 2021Par Vincent Verhaeghe, photos Vincent Baillais, andia.fr
En ce début septembre, la vie reprend doucement son cours chez VMware, au 29e étage de la tour Franklin, qui domine le parvis de la Défense. Quelques collaborateurs de l’éditeur qui le souhaitent encore sont en télétravail, mais la grande majorité a retrouvé les chemins du bureau et, malgré les masques obligatoires, on devine les sourires ou la joie de retrouver ses collègues autour d’un café. C’est dans cette ambiance détendue que nous accueille Olivier Savornin qui dirige VMware France depuis sept mois. Et cela fait sept ans qu’il travaille pour cette filiale ; son parcours entérine sa nomination à une fonction managériale pour laquelle il succède à Anthony Cirot, parti diriger l’entité hexagonale de Google Cloud. Éditeur innovant dont la croissance se confirme depuis sa création, VMware est d’abord une entreprise de haute technologie, une caractéristique qu’Olivier Savornin possède dans ses gènes. « Issu d’une famille de scientifiques et d’ingénieurs, je me tourne naturellement vers des études dans ce domaine, et y commence ma carrière », évoque le sémillant quinqua. Né à Paris, originaire de l’Hérault par sa famille, et breton de coeur par son épouse, Olivier Savornin décroche un master à l’ESME-Sudria. Son diplôme en poche, il obtient un poste d’ingénieur chez l’équipementier Nortel où il gère notamment l’aspect technique des cartes de déploiement du réseau mobile. Un univers où tout est à faire et qui se réinvente au gré des normes. « J’ai eu de la chance car on sortait de quelques années où trouver du travail dans ce secteur était difficile, mais c’est reparti à ma sortie de l’école. » Il reste onze ans chez Nortel où il forge une bonne part de son expérience.
« Les plans de formation dédiés notamment à nos partenaires, doivent pallier la pénurie de talents »
LE VENT EN POUPE
À cette époque, les grands groupes confient volontiers des missions lourdes à la jeune génération et, sautant sur la moindre occasion de voyager ou de découvrir une culture, Olivier part en Asie où il déploie le réseau mobile de Singapour Telecom. À son retour, et bien qu’attaché à la technologie, il prend davantage de responsabilités du côté commercial. « En fait, mes deux premières années consisteront surtout à apporter une contribution technique après-vente, tandis que les cinq années suivantes sont davantage liées à l’avantvente. » Il prend la tête d’une équipe commerciale qui, par la nature même de Nortel, traite des projets d’envergure. « On ne regarde rien à moins de 100 M€, et nous traitons avec les plus grands opérateurs qui existent dans le monde. C’est la période à laquelle les réseaux mobiles passent de la 2G à la 3G, et où les cotations complexes tiennent compte autant des déploiements techniques que du management des ressources humaines », se remémore Olivier Savornin. Le plus gros projet dont il a à s’occuper pèse 1,8 Md€ et concerne le troisième opérateur espagnol. « Même âgé de seulement trente ans, je suis celui qui compte le plus d’expérience ! Car beaucoup de collaborateurs extrêmement compétents, frais émoulus des écoles, manquent d’éléments autour des soft skills, comme le travail en équipe. »
« La rapidité d’action constitue l’une des grandes forces des solutions VMware et de ses équipes d’ingénierie.
À LA FRONTIÈRE ENTRE LES TÉLÉCOMS ET L’IT
Il revient en France et, toujours chez Nortel, adresse notamment les collectivités locales. Il reste bien sûr proche du monde des télécoms, et dans le cadre d’un projet pour Cegetel, il entre en contact avec Cisco. « C’est là notamment que j’arrive de plain-pied dans le modèle de la vente indirecte qui prévaut dans l’IT. L’approche diffère radicalement, car on y conclut des contrats standard où les pénalités pèsent beaucoup moins qu’avec les opérateurs qui exigent des engagements contractuels forts. » Onze ans passent… Chez Nortel dont il estime avoir fait le tour et qui peine en outre à se réinventer alors que la convergence entre IT et télécom bat son plein, il entre chez Cisco à la faveur d’un projet de création de consortium entre le californien, l’opérateur Cegetel et l’équipementier chinois Huawei. Chez Cisco, il reste au contact des opérateurs, faisant partie d’une équipe commerciale dédiée à SFR, groupe qu’il finira par chapeauter avant d’être nommé trois ans plus tard à la direction commerciale de Cisco pour l’ensemble des clients télécoms. Une division qui, sous son mandat, triplera son revenu. La dernière de ses sept années chez Cisco, se passe à la direction des ventes des grands comptes de la bancassurance. « Un domaine dans lequel Cisco n’opère qu’en indirect et qui me rapproche du channel et des partenaires, mais au prix de process omniprésents qu’on retrouve souvent dans les grands groupes américains. Les commerciaux passent la moitié du temps à remplir l’outil de CRM… Cela me donne envie de découvrir autre chose. » Loin de rester sur ses acquis, et désireux de développer des compétences, il décroche en parallèle de son travail chez Cisco, un MBA en management à HEC, « une période où il m’arrive de faire les 35 heures en deux jours ! » s’amuse-t-il. Ses voeux de changement sont exaucés puisqu’en octobre 2012, Samsung le recrute pour lancer et développer en France son activité B2B. Le défi est de taille car l’offre couvre autant la téléphonie mobile que l’affichage dynamique ou l’hospitality. Des projets et des produits aux antipodes de ceux qu’il traitait chez Nortel et Cisco, mais plus encore un véritable choc culturel d’entreprise. « Samsung engage un budget marketing monumental, mais avec beaucoup de zones grises sur le management. On est dans le respect total du patron qui implique le suivi d’un message unique, et la transition vers le B2B est souvent complexe pour une marque ancrée dans le B2C comme Samsung. Dans le B2B, les ventes décident et le marketing exécute, dans le B2C c’est le contraire », résume-t-il. Enrichissante et frustrante à la fois, l’expérience Samsung dure deux ans, et Olivier voit deux propositions s’offrir à lui, fin 2014 : la direction française de Citrix ou la mise en place avec prise en charge d’une business unit réseau et sécurité de VMware pour l’Europe du sud, le Moyen-Orient et l’Afrique.
« Certes, grâce aux outils numériques, nous opérons de façon remarquable, mais on constate une saturation digitale qui nous incite à renouer le contact »
ENTRÉE DANS LE VIRTUEL
« Mon hésitation est profonde ; je dois consulter une dizaine de DSI qui me conseillent tous de choisir VMware, prédisant, à juste titre, sa forte croissance. » Il y retrouvera aussi un environnement technologique au coeur duquel il se sait à l’aise. À cette période, VMware est encore une entreprise quasi monoproduit avec vSphere, mais entame sa diversification avec la solution NSX destinée à virtualiser des réseaux. « Sous la houlette de Pat Gelsinger, ils décident de bâtir sur les réseaux la même logique que celle suivie sur les serveurs pour finalement, en y intégrant aussi le stockage, bâtir une infrastructure au service de l’application. » Il évolue au sein de la société, et prend, en 2017, la responsabilité des comptes globaux de l’éditeur, ce qui correspond à quatorze groupes internationaux dont Airbus ou la Société Générale. « Avec cette catégorie d’entreprises, nous ne sommes plus dans une logique de relation entre le fournisseur et son client, mais dans la coconstruction de vastes projets de transformation numérique qui obligent à agir vite. La rapidité d’action constitue justement l’une des grandes forces des solutions VMware et de ses équipes d’ingénierie. Par exemple, un projet de migration de quelque 100 000 machines virtuelles pour le compte de Banco Santander prévu sur cinq années, a être réalisé en… deux ans. » Ses interlocuteurs sont autant les Chief Information Officers de ces groupes que les responsables des grands clouds publics avec lesquels VMware passe accord sur accord, au gré d’une diversification qui ne s’arrête plus. Après quatre ans à cette fonction stratégique, il prend finalement la direction de la filiale française de VMware. Une nomination qui s’effectue dans le contexte compliqué de la pandémie, et qui nécessite un effort particulier sur le plan humain. « Les outils numériques nous permettent d’opérer de façon remarquable, certes, mais on constate une saturation digitale qui nous incite à renouer le contact. Nous avons rouvert les bureaux fin juin, et petit à petit, la jauge augmente pour, sans doute, revenir à 100 % des effectifs présents d’ici à la fin d’année. Cela fait partie de mon job de créer une véritable entité VMware, par exemple, en intégrant les équipes de Pivotal qui n’avaient jamais pu venir dans nos locaux depuis qu’ils font partie du groupe. » Il dresse le même constat sur les partenaires pour lesquels il a fallu gérer beaucoup de situations à distance, ce qui est encore plus complexe dans le cadre de grands projets de transformation qui concernent parfois plusieurs partenaires. « Mais le challenge principal auquel je fais face, comme beaucoup de dirigeants, c’est le déficit de compétences. La bataille des talents est plus féroce que jamais, et nous mettons en place des plans de formation pour nousmêmes, et pour nos partenaires. »
REPÈRES
Olivier Savornin, 50 ans, est marié et père de quatre enfants
PARCOURS
1994 ESME-Sudria, master of science, Computer Systems Networking & Telecommunications
1994 Nortel : ingénieur en traitement du signal, responsable du déploiement de réseaux mobiles, directeur commercial du compte SFR Cegetel, directeur grands comptes
2005 Cisco : responsable du compte SFR Neuf Cegetel, directeur commercial Telecom et Media, directeur commercial pour les clients grands comptes bancassurance
2008 HEC Paris, MBA direction managériale
2012 Directeur de la division B2B de Samsung France
2014 VMware : directeur commercial de la B.U. Réseau et Sécurité (Europe du sud, Moyen-Orient et Afrique), directeur des comptes globaux (Europe du sud, Moyen-Orient et Afrique)
Depuis mars 2021 VP et directeur général VMware France
J’AIME…
VOYAGES Saint-Lunaire, en Bretagne nord, l’Italie et l’ Espagne.
SPORTS Tennis (classé 15/4), jogging, golf. Le rugby, mais désormais en spectateur.
LITTÉRATURE Les Lagarde & Michard, « je m’endors souvent avant d’en avoir lu une page. »