Mutation de l'espace de travail

La grande mutation du poste de travail

La crise sanitaire et celle de l’énergie accélèrent la transition numérique et écologique des immeubles de bureaux. État des lieux dressé par les 600 professionnels de la convergence entre audiovisuel, IT et IoT réunis à l’AVTECH Summit 2022.

Déc 2022
Par Thierry Bienfait

Le Covid n’aura pas eu la peau des employés de bureau. Quant aux acteurs de la tech dédiée à la numérisation des bâtiments à usage professionnel, l’émergence du flex office puis de la sobriété énergétique n’a pas rebattu les cartes en leur défaveur.

Au contraire. La crise sanitaire a accéléré la digitalisation de l’immobilier pour transformer le bureau en lieu d’échange et de lien social modernisé. « Beaucoup de sociétés mènent une réflexion sur la façon de concevoir autrement les espaces de travail, indique Olivier Le Fol, cofondateur de Twinsys, éditeur spécialisé dans la digitalisation des espaces de travail.

Nombreuses sont celles qui étudient une recomposition des open spaces, en limitant les nuisances subies par leurs collaborateurs sur ces grands plateaux. » Les sociétés du tertiaire ont aussi pris conscience de la nécessité d’offrir aux salariés des espaces de travail diversifiés, en fonction des tâches à accomplir. « On comptera sans doute moins de surface attribuée aux postes de travail, au profit d’espaces dédiés à l’échange, à la créativité, à la formation », juge Philippe Morel, CEO de Dynamic Workplace, société de conseil dans l’immobilier tertiaire partagé.

L’hybridation étant probablement appelée à s’accentuer, l’espace de travail deviendra un lieu où l’on se sentira bien, anticipent les spécialistes en architecture intérieure. « Il sera adapté à toutes les situations, pour répondre au besoin de se retrouver à plusieurs, ou au contraire de s’isoler pour téléphoner, par exemple », prévoit Valérie Ducruet, directrice de Bene France, société experte en conception et aménagement de bureaux.

« Depuis longtemps l’immeuble de bureau n’est plus un lieu de production individuelle, seulement destiné à loger des employés, note Jérémie Bellec, CEO de SpinalCom, fournisseur de solutions de transition digitale des bâtiments. Son intérêt est de créer de la communication, de l’échange, de diffuser la culture d’entreprise. C’est un vrai outil de management. Et nous en prenons pleinement conscience. »

« Le bureau n’est pas mort, abonde Philippe Morel, chez Dynamic Workplace. Il vient au cœur de la stratégie de l’entreprise. » Néanmoins, le bouleversement du télétravail et du flex office touchera bien, à terme, les 18 millions de salariés de bureau recensés en France par l’Insee. Déjà, avec l’adoption du télétravail, il est admis qu’un bureau, au sens de table de travail, n’est plus occupé que 40 % du temps, hors réunions, congés et RTT. La logique économique pourrait s’emballer. C’est pourquoi certains n’hésitent pas à pronostiquer la fin du bureau.

47 %
des entreprises sont prêtes à rationaliser leur parc immobilier en adoptant des outils numériques

(Source : JLL)

Economie d’énergie à tous les étages

Quoi qu’il en soit, redéfinir l’affectation des locaux de travail pour migrer vers du smartbuilding, un bureau supposé plus « intelligent », n’est pas une sinécure. Outre les moyens à mettre en œuvre pour qu’il garde cette force attractive, la réflexion porte aussi sur un enjeu environnemental majeur : le bâtiment représente, à lui seul, 44 % de la consommation d’énergie.

Les prix de celle-ci ayant atteint des sommets, les entreprises et administrations sont contraintes de se mobiliser dans la chasse au gaspi. C’est tout le secteur du tertiaire qui cherche à investir dans de nouveaux objectifs de baisse de la consommation d’énergie. Les demandes devraient donc affluer auprès des fournisseurs pour acquérir des solutions susceptibles de réduire les factures d’électricité. Et ce d’autant plus que beaucoup de ces systèmes adressent simultanément les questions liées au bon fonctionnement des organisations, et celles concernant le bien-être des collaborateurs en présentiel ou en distanciel.

« Les technologies du numérique autorisent une analyse plus pertinente et une meilleure compréhension de la vie du bâtiment. Grâce à des interfaces de contrôle, le pilotage des performances de l’immeuble s’opère de manière très fine et en temps réel », explique Olivier Le Fol, chez Twinsys. Pour répondre aux attentes, de nombreuses marques IT se sont lancées dans un vrai Concours Lépine afin de proposer des appareils qui convertissent des bureaux en lieu d’interactions, et augmentent la rentabilité dans l’efficacité énergétique.