Le portable ne connait pas la crise
Sur le marché florissant du portable, dominé à outrance par trois géants, les challengers se positionnent parfois sur des segments plus verticaux et plus valorisés. Le tout, sur fond de hausse spectaculaire de la demande.
Sep 2020Par Vincent Verhaeghe
Encore très peu de notebooks sont proposés sur le marché avec une interface LTE 4G en standard. Le plus souvent, cet élément, lorsqu’il est accessible, est une option que l’utilisateur doit décider lors de l’achat. Mais les promesses de la 5G, aussi bien en termes de facilité de connexion que de débit, devraient faire évoluer ce principe. Les marques se préparent en effet à intégrer la 5G à leurs notebooks haut de gamme, de façon beaucoup plus systématique pour être prêts lorsque les réseaux seront accessibles (ce qui, selon les pays, prendra plus ou moins de temps d’ici à 2022). Au dernier CES, nous avons ainsi découvert, parmi les modèles, le Lenovo Flex 5G. Mais Dell avec le Latitude 9510, ou HP avec la seconde génération de DragonFly, sont, eux aussi, prêts pour cette nouvelle norme qui donnera sans aucun doute un coup d’accélérateur supplémentaire au marché du notebook.
Avant la crise, le PC portable se portait déjà bien. Année après année, il prenait des parts de marché au PC de bureau grâce à des produits non seulement performants, mais, en outre, dotés d’une connectique les rendant parfaitement polymorphes. De plus, leur autonomie leur attribue enfin de vrais progrès après une décennie de quasi-stagnation. Mais comme nous l’évoquons dans ce dossier (lire aussi p.86), la crise de la Covid-19 accélère les changements de mentalité vis-à-vis du télétravail, et incite les entreprises à investir massivement dans la mobilité. « Avec cette pandémie, nous avons concentré en trois mois l’équivalent de deux ans de progression dans le télétravail », explique Stéphane Huet, président de Dell France. Les chiffres basés sur les ventes des distributeurs IT que nous communique le cabinet d’études Context sont d’ailleurs sans appel. Au second trimestre 2019 la part du mobile sur le marché du PC représentait 76 % des revenus de la distribution. Un an après, en plein coeur de la pandémie, cette part atteint 85 %, et il y a fort à parier que la tendance se confirme. « À ce rythme, le PC sous forme de desktop deviendra un produit de niche », soulignait récemment un revendeur britannique sur le site de nos confrères CRN.com. Une remarque d’autant plus juste qu’à bien des égards, le portable n’a plus grand-chose à envier au PC de bureau. En termes de performances d’abord, on retrouve dans les deux univers, des processeurs identiques ou comparables dont l’appétit en énergie a été adapté par les fondeurs.
AMD RÉUSSIT UN TOUR DE FORCE ET MONTE EN FLÈCHE
En outre, un cercle vertueux se fait jour, dans ce secteur, grâce à la résurrection entamée par AMD en 2017, et qui se confirme largement. Un rapport de Mercury Research publié juste avant le confinement, indique que sur le marché de la mobilité (hors IoT et smartphones), plus de 16 % des produits intégraient, fin 2019, un processeur AMD. Un vrai tour de force de la marque sur une période aussi courte, d’autant que les CPU mobiles ont toujours été le point faible du fondeur. Bien au contraire, aujourd’hui, AMD insiste dans ce domaine avec des gammes dédiées et prometteuses comme le Ryzen Pro 4000 mobile sorti en février 2020. Et les grands constructeurs s’adaptent rapidement. Voilà quelques mois, HP, Lenovo, et Dell se contentaient d’un ou deux modèles sous étendard AMD, et cela, plutôt pour des produits d’appel. La stratégie de ces marques envers le fondeur est devenue proactive. « Une partie de nos gammes sont disponibles, au choix, équipées d’un processeur Intel ou d’un AMD. Cela obéit à une véritable demande des entreprises, et qui récompense les efforts technologiques effectués par AMD », souligne Clémentine Rivoal, Category Manager Business Notebook, chez HP France. En face, Intel peine à se renouveler. Et si les générations de Core se succèdent à un rythme soutenu – la dixième génération Comet Lake a été annoncée en avril 2020 –, la révolution technique que l’on attend de la part du géant de Santa Clara n’a pas encore eu lieu¹.
« Une partie de nos gammes sont dotées d’un processeur Intel ou d’un AMD, ce qui répond à une vraie attente »
Clémentine Rivoal, Category Manager Business Notebook, chez HP France
DES COMPOSANTS À LA HAUTEUR
Bien sûr, le processeur est significatif mais il ne fait pas tout. D’autres éléments technologiques expliquent la domination du portable face au desktop, avec en tête de pont, l’affichage. Ici, le notebook profite à plein des évolutions réalisés sur les smartphones. Ainsi apparaissent les premiers écrans pour PC portable à base de technologie OLED. Elle confère non seulement des couleurs et un contraste remarquables, mais aussi fait monter en résolution. Si le Full HD reste la norme sur la plupart des modèles mainstream, voici qu’apparaissent des notebooks avec écran 4K. Et nous ne parlons pas ici de stations graphiques 17 pouces(lire l’encadré ci-contre) mais de modèles destinés à un usage « classique ». Et sur les produits haut de gamme, ces écrans bénéficient parfois de GPU dédiés les dotant de performances graphiques inédites qui attirent des usagers aux velléités de création graphique. Quant au stockage, la Flash est en passe de supplanter le disque dur traditionnel. Certes, on trouve encore quelques modèles d’entrée de gamme dotés d’un disque mécanique mais le SSD est devenu la norme, avec, pour surpasser les limitations en termes de capacité, l’intégration de deux modules Flash chez certains constructeurs.
« Avec cette pandémie, nous avons concentré en trois mois, l’équivalent de deux ans de progression en télétravail »
Stéphane Huet, président de Dell France
LES MODÈLES DEVIENNENT PLUS LÉGERS, PLUS AUTONOMES
Côté conception, les marques doivent faire preuve d’imagination pour se distinguer, car un grand nombre de modèles se basent sur les prérequis du form factor Athena défini par Intel. Mais des disparités existent cependant sur les matériaux utilisés. Exemple : les alliages de magnésium augmentent la robustesse et réduisent le poids. On ne sera donc plus surpris de trouver des notebooks pesant moins de 1 kg. Mais le plus remarquable est que, simultanément, l’autonomie atteint des sommets. Fini le temps où disposer d’une batterie apte à tenir cinq heures relevait du miracle : les marques soulignent que leurs produits fonctionnent plus d’une journée entière de travail. Un chargeur encombrant devient par conséquent de moins en moins nécessaire. Un argument « de poids » en ces temps où la mobilité devient critique.
LES STATIONS DE TRAVAIL PORTABLES ONT LA COTE
Les stations de travail portables qui représentaient, voilà quelques années, une niche aux débouchés confidentiels est en passe de s’affirmer comme une branche aussi active que lucrative du marché du notebook. Certes, les volumes sont sans commune mesure avec ceux des portables traditionnels mais pour les marques, les distributeurs et les revendeurs, c’est une manne, car les marges sur ces produits haut de gamme sont substantielles, et les clients finaux les combinent à du logiciel et du service. Quasiment toutes les marques disposent de leur catalogue de stations de travail portable, aidées en cela par la mise sur le marché de composants graphiques adaptés chez Nvidia et AMD, et par l’intégration d’écrans aptes à répondre aux exigences de calibrage colorimétrique.