Vincent Chamouleau - Xerfi

La startup nation à l’heure du choix

Après quelques années d’activité intense, la French Tech arrive à la croisée des chemins. C’est le moment d’évaluer les chances et les risques de cette initiative cruciale, défiée par la contraction de l’activité économique.

Fév 2023
Par Vincent Chamouleau, chargé d’études, Xerfi

La fin de l’abondance semble se profiler pour le secteur de l’accompagnement des startup. La récession qui s’annonce n’a en effet pas fini de bousculer les acteurs. D’un côté, les petits incubateurs vont devoir composer avec la baisse des créations d’entreprises, tandis que la dégradation des conditions de financement complique l’équation des jeunes pousses. De l’autre, les structures devront gérer le recentrage des aides publiques sur les mieux établies, ou sur les secteurs à haut potentiel comme les deeptech, très à la mode ces derniers temps.

Dans ce contexte, le durcissement des conditions de financement, mais aussi la dégradation des valorisations de jeunes pousses, vont limiter les perspectives de rentabilité. Les fonds vont enfin réduire la voilure des investissements pour préserver les liquidités, limiter la prise de risque, et favoriser les investissements plus sûrs. L’heure est à la rationalisation.

La poursuite de la consolidation en question

De nombreux acteurs composent l’écosystème des structures d’accompagnement. Outre les incubateurs, accélérateurs et autres campus, qui se caractérisent par la forte dimension technologique des startups accompagnées, on recense des fab labs, des espaces de coworking et des pépinières en tout genre. Pour autant, des structures hybrides émergent. Elles proposent une offre variée aux entreprises comme des espaces de travail en commun, des sessions d’accompagnement ou encore des activités de conseil. Dans la logique de développement d’une offre globale, les opérateurs de l’écosystème des jeunes pousses peuvent mutualiser leurs savoir-faire, et optimiser l’accompagnement.

De tels partenariats voient le jour à différentes échelles géographiques. Ils peuvent être à vocation généraliste ou thématique. C’est d’autant plus vrai que les perspectives économiques, nettement plus sombres, vont dégrader l’activité des structures. Et accélérer la consolidation du secteur autour d’une poignée d’acteurs fédérant toujours plus de partenaires et de startups. En clair, les marges des incubateurs seront encore plus sous pression, et comme coincées entre une demande en berne et la (vraisemblable) baisse du prix des prestations d’hébergement destinées à attirer les porteurs de projets.

« La refonte des modèles d’affaires propres aux incubateurs s’impose pour pérenniser l’activité »

Repenser les modèles d’affaires

Il faut bien comprendre que les structures d’accompagnement ont tendance à se spécialiser autour d’un secteur d’activité (automobile, aéronautique) ou d’une technologie (blockchain, IoT). Ce ne sont que quelques exemples. Mais d’une façon générale, cette situation leur permet de profiter des effets d’apprentissage. Il est possible en effet de se doter d’une expertise reconnue par les entrepreneurs et les investisseurs, tout en renforçant la promesse de valeur.

Face à des modèles très dépendants des subventions et de l’environnement économique sur fond d’intensité concurrentielle croissante, la refonte des modèles d’affaires propres aux incubateurs s’impose pour pérenniser l’activité. Une telle évolution passe par la diversification de leur offre, notamment en proposant de nouveaux services aux entreprises. à titre d’exemple, Starbust Aerospace a réalisé des prestations de conseil en stratégie et en innovation auprès du groupe Rafaut, qui intervient comme équipementier aéronautique.

Certaines structures déploient des offres d’accompagnement pour le compte de tiers. Start-Up Palace, par exemple, se positionne comme créateur-exploitant d’incubateurs en marque blanche. à l’arrivée, la crise sourde qui fragilise les certitudes de l’économie numérique servira sans doute d’électrochoc salutaire pour les participants les plus audacieux.

Bio express

Titulaire d’un master de recherche en économie et finance, Vincent Chamouleau travaille pour l’institut d’études privé Xerfi, spécialisé dans l’analyse sectorielle et concurrentielle. Fort de son expertise sur les thèmes, des médias et au monde de la communication, il se passionne pour l’économie numérique, et notamment pour le présent et l’avenir des incubateurs ou accélérateurs, qui se situent au cœur même de l’écosystème français.